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Une hiérarchisation du racisme ?

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Vangelis
JimmyB
Zingaro
Silentio
aldolo
Euterpe
10 participants

descriptionUne hiérarchisation du racisme ? - Page 4 EmptyRe: Une hiérarchisation du racisme ?

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Euterpe a écrit:
Opiner, c'est bien plus affirmer quelque chose de soi que quelque chose, c'est une modalité de l'affirmation de soi. Ainsi, lorsque deux opinants s'opposent, ils opposent moins deux opinions que deux ego. Le relativisme égalitaire de l'opinion ne repose que sur cela et contribue à renforcer la confusion entre soi et ses opinions propres. Ajoutons à cela le dogmatisme de l'opinion et le conformisme induit, vous obtenez la moralisation ambiante. Si remettre en cause une opinion équivaut à remettre en cause l'individu qui l'énonce, le "danger" est de nier une personne dont la valeur est d'autant plus grande que l'individu en soi est une affirmation dont toutes les autres procèdent.

Mais alors il n'y a pas à craindre de radicalisation de l'opinion, puisque celle-ci, même si elle se produit, ne fera qu'engendrer une réaction morale pour la neutraliser, notamment via le conformisme. En réalité, on a peur de la liberté de débattre, et c'est comme si la société empêchait, par crainte de la violence, toute véritable discussion. En même temps, j'ai l'impression que l'opinion se radicalise, mais que toute radicalisation (de droite ou de gauche) est morale. Si je vais plus loin, je me dis que c'est le libéralisme qui est menacé, non la société. A moins que la fin du libéralisme entraîne un regain de fanatisme (mais il faudrait alors ne pas avoir peur de la guerre de tous contre tous, or aujourd'hui l'individu craintif est roi).
Euterpe a écrit:
Autrement dit, M est un phénomène singulier, dont la singularité suscite d'abord l'incompréhension. De ce point de vue, rien de nouveau depuis une trentaine d'années. Le problème, c'est la confusion, chez les antisémites, entre sionisme et judaïté ; ainsi que l'ignorance où ils sont des diverses "sensibilités" sionistes.

Chose trop complexe pour les paranoïaques qui trouvent, tels les tyranneaux, un peu de puissance dans ce phantasme qu'est la théorie du complot : cela explique tout sans rien expliquer, catalyseur du ressentiment ambiant.
Euterpe a écrit:
Nous assistons peut-être aux dernières conséquences désastreuses de l'élection du président de la république au suffrage universel. Cette donnée de la Ve République n'est pas seulement un élément perturbateur dans le jeu des institutions. Elle me paraît conduire tout droit à l'autonomie définitive du social (contrairement à Castoriadis, je pense que la politique est une hétéronomie sociale - si je reprends sa terminologie -, qui doit absolument rester infrangible, parce que je ne crois pas qu'une société soit capable d'accéder à elle-même autrement que politiquement).

Vous êtes donc plus du côté de Lefort que de Castoriadis, si je comprends bien. Je tendrais à vous rejoindre, après quelques mois de réflexion - même si Castoriadis considère bien que toute institution suppose une hétéronomie irréductible (mais il serait par conséquent difficile de la qualifier ainsi). Faut-il aussi penser que sa vision de la société autonome est un leurre (en dépit de l'auto-limitation qui en est la condition), de la même manière que la volonté générale de Rousseau serait belle sur le papier (en droit) et non dans les faits, irréalisable (cf. la critique qu'en fait par exemple Pierre Manent, volonté générale vs. volonté de tous) ? Sans la politique, la société perdrait-elle tout garde-fou (toute auto-limitation réelle qui permettrait la liberté) ?

Mais je ne comprends pas bien la cause de cette autonomisation de la société (que je comprends comme une montée de l'hétéronomie, puisqu'allant contre le politique) : est-elle due au présidentialisme ou à son affaissement ? Autrement dit, lorsque vous dites que la politique est une hétéronomie sociale, réfutez-vous la démocratie au profit d'autre chose ou envisagez-vous tout de même la démocratie (par exemple de manière lefortienne contre la démocratie participative ou la pseudo-démocratie actuelle) ?
Euterpe a écrit:
Je ne vois pas la Ve République perdurer, précisément parce que l'impératif de la transparence à elle-même qu'exige la démocratie imposera des changements institutionnels profonds.

Vers plus ou moins de politique ? Est-ce ou non une bonne chose ?
Euterpe a écrit:
Or la France n'a jamais su opérer des transitions historiques autrement que sous la forme de révolutions et, le plus souvent sous la forme d'une guerre civile. Bien sûr, les moyens policiers sont incomparablement plus efficaces aujourd'hui qu'ils ne l'étaient auparavant, mais l'état des banlieues montre que la société civile n'a pas peur de défier la police, et sait se montrer efficace également.

Le risque étant de ne pas aller vers plus de démocratie, mais bien l'inverse... Qui lutte, aujourd'hui, sinon des populistes qui croient parler au nom d'un peuple introuvable ?
aldolo a écrit:
D'autre part, je n'ai parlé en ce qui me concerne que d'un sentiment (je peux me tromper). Celui que j'avais, comme quoi la très grande majorité des gens se foutent aujourd'hui de savoir si untel est juif ou pas (alors qu'à mon sens le racisme anti-arabe ou anti-noir est encore présent). Vous êtes en droit de m'opposer votre opinion à vous, pas de prétendre à l'exclusive d'un fait sur votre seul ressenti, en tous cas sans le moindre argument pour l'étayer. (C'est pourquoi je pense qu'il est vain de prolonger sur cette affaire.)

L'anti-sionisme très répandu aujourd'hui mène le plus souvent, sans se l'avouer, à l'antisémitisme, ne serait-ce parce que oui, on fiche les personnalités selon leurs appartenances pour savoir si oui ou non tel ou tel est contre le peuple. Est-il Juif, a-t-il un peu de pouvoir ? Donc il doit être sioniste, c'est-à-dire un ennemi, un salaud (comme si, d'ailleurs, cela allait de soi). On essentialise encore le Juif pour le traquer. C'est le cas en banlieue à cause du conflit israelo-palestinien (comme si tout Juif était Israélien, d'ailleurs il y a des arabes avec la nationalité israélienne), ce qui se mêle à la chasse aux possédants par l'extrême-gauche et au vieil antisémitisme d'extrême-droite, surtout en temps de crise (car le Juif s'oppose à la nation en tant qu'il fait partie de l'élite, est cosmopolite et travaille dans la finance - ce qui est tout de même prendre une partie des Juifs pour l'ensemble). Aujourd'hui il ne fait pas bon être perçu comme Juif (= argent = traitre à la nation = sioniste = bouc émissaire parfait, forcément mauvais et coupable, pour exercer sur lui son ressentiment). Et malheureusement, plus la réaction des Juifs sera communautaire, plus il y a aura une hiérarchisation entre le traitement de l'antisémitisme et des autres racismes, et plus les Juifs seront détestés et les violences faites à leur encontre acceptées par la population. Mais l'antisémitisme ordinaire commence dès qu'on pense, par exemple, que "c'est normal, les Juifs ont tout l'argent" ou "sont tous riches". On entend cela souvent au quotidien. C'est pernicieux car latent. De la même manière que lorsqu'on exclut (moralement) le Juif de la communauté quand on dit à n'importe qui qu'il "fait son truc en feuj" (= dans son coin, égoïstement, ce qui est mal). Expression banalisée depuis des lustres.

descriptionUne hiérarchisation du racisme ? - Page 4 EmptyRe: Une hiérarchisation du racisme ?

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J'entends bien ce que vous dites Silentio, que j'avais d'ailleurs rapidement évoqué. Le problème posé est de savoir si l'antisémitisme est en régression ou pas. Vous et Euterpe l'affirmez, je ne le ressens pas du tout comme ça, voilà tout. 
Histoire ou pas, la régression est de toutes façons évidente si l'on se réfère au climat d'avant-guerre !
J'ai aussi mentionné l'antisémitisme de certains jeunes de banlieue manipulés par des pseudo-religieux. Le piège de ce débat consiste justement à glisser à partir de là sur un antisémitisme musulman et de stigmatiser ainsi les musulmans. C'est pourquoi je n'insisterai pas longtemps sur ce fil, et ce d'autant que personne ne reprend mes distinctions sur les types de racisme que je pense intéressantes.
Ce qui m'étonne quand même, c'est de lire la phrase suivante (je vous cite) : "Et malheureusement, plus la réaction des Juifs sera communautaire, plus il y a aura une hiérarchisation entre le traitement de l'antisémitisme et des autres racismes, et plus les Juifs seront détestés et les violences faites à leur encontre acceptées par la population"
"Les violences faites à leur encontre acceptées par la population" ? Mais où avez-vous vu ça ?
Moi ce qui m'embête, c'est que pendant cinq ans, on a stigmatisé clairement les musulmans. On a été immergés dans cette ambiance au point que c'est à peine si j'ai lu des gens s'indigner sur le fait qu'une question sur trois portait sur eux dans le questionnaire supposé discuter de l'identité nationale ! Ça c'est pas des ressentis ou des affirmations (sans argument), ce sont des faits ! Tout comme un sondage récent indiquant que les 3/4 des français considéreraient que l'Islam est incompatible avec les valeurs de la République.
Aussi quand j'entends qu'on s'inquiète de la montée de l'antisémitisme, ça me rend dubitatif.
... quant aux différences de traitement, thème originel du fil, puisque donc on ne reprend pas mes types de racisme en guise d'explication, je m'arrête ici en ce qui concerne ce fil.

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Je ne vois pas la contradiction entre une méfiance intolérante vis-à-vis de l'islam et de ses représentants d'un côté, et de la montée d'un antisémitisme de l'autre.

descriptionUne hiérarchisation du racisme ? - Page 4 EmptyRe: Une hiérarchisation du racisme ?

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aldolo a écrit:
Le problème posé est de savoir si l'antisémitisme est en régression ou pas.

Il persiste, voire augmente. La sacralisation de la Shoah n'empêche pas le ressentiment, elle aurait même tendance à l'exacerber. Mais il s'exprime par des moyens détournés.
aldolo a écrit:
Vous et Euterpe l'affirmez, je ne le ressens pas du tout comme ça, voilà tout.

Euterpe ne vous demande pas votre sentiment, mais de vous baser sur des données objectives. Par ailleurs, vous ne pouvez pas décréter qu'il n'y a pas d'histoire.
aldolo a écrit:
Histoire ou pas, la régression est de toutes façons évidente si l'on se réfère au climat d'avant-guerre !

Pas tout à fait, l'antisémitisme est moins partagé et virulent, mais il est encore là, sous de nouvelles formes (rappelez-vous l'affaire Fofana).
aldolo a écrit:
J'ai aussi mentionné l'antisémitisme de certains jeunes de banlieue manipulés par des pseudo-religieux. Le piège de ce débat consiste justement à glisser à partir de là sur un antisémitisme musulman et de stigmatiser ainsi les musulmans.

Cet antisémitisme existe bel et bien, même sous forme d'anti-sionisme. Et il s'ajoute à l'antisémitisme traditionnel que l'on cultive en France dans les milieux extrémistes.
aldolo a écrit:
Moi ce qui m'embête, c'est que pendant cinq ans, on a stigmatisé clairement les musulmans. On a été immergés dans cette ambiance au point que c'est à peine si j'ai lu des gens s'indigner sur le fait qu'une question sur trois portait sur eux dans le questionnaire supposé discuter de l'identité nationale !

Cette stigmatisation continue, elle est dégoûtante. Mais pourquoi l'opposer à l'antisémitisme ? Les deux phénomènes coexistent, ce n'est pas l'un au détriment de l'autre (d'ailleurs Euterpe a bien fait de rappeler que l'antisémitisme concerne tous les sémites, non les seuls Juifs).
aldolo a écrit:
Tout comme un sondage récent indiquant que les 3/4 des français considéreraient que l'Islam est incompatible avec les valeurs de la République.

En quoi cela est-il choquant ? Le problème c'est que les Français sont hypocrites : la laïcité oui, mais plutôt en faveur du christianisme. Mais il n'est pas raciste de penser que la République est incompatible avec toute religion. Elle ne fait que la tolérer dans certaines limites, sous certaines conditions. Pourquoi n'aurait-on pas le droit de critiquer l'Islam quand il est contraire à nos valeurs républicaines ? Parce que c'est heurter la sensiblerie de gens qui croient en des fadaises ?
aldolo a écrit:
Aussi quand j'entends qu'on s'inquiète de la montée de l'antisémitisme, ça me rend dubitatif.

Parce qu'au fond vous suspectez le prétendu "système" de sauvegarder sa domination, lorsqu'elle est attaquée, en invoquant l'antisémitisme. Vous estimez que c'est une manière de masquer ou minimiser ce qui se passe à l'encontre des musulmans (l'ennemi intérieur par qui la République se légitime, les blasphémateurs qui nourrissent la loi). Est-ce que je me trompe ?
JimmyB a écrit:
Je ne vois pas la contradiction entre une méfiance intolérante vis à vis de l'islam et de ses représentants d'un côté, et de la montée d'un antisémitisme de l'autre.

Tout à fait, ce n'est pas incompatible.

descriptionUne hiérarchisation du racisme ? - Page 4 EmptyRe: Une hiérarchisation du racisme ?

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Le fait que vous répétiez ce qu'a dit Euterpe n'en fait pas une vérité. Vous êtes même en pleine contradiction. D'un côté vous (enfin Euterpe, le forum) reprochez aux gens - avec menace d'exclusion à l'appui - que les "opinions" (ressentis etc) sont plutôt mal venues dans un forum philo, ce à quoi je suis capable de souscrire - la philosophie, selon mon cher Deleuze, étant a priori "en guerre" contre l'opinion. De l'autre, vous ne faites rien d'autre que mettre en avant les vôtres, d'opinions, en vous contentant de les "affirmer" pour faire passer la pilule, allant même jusqu'à parler de "données objectives". Moi, j'ai simplement pris la précaution sémantique de parler de "ressenti" en ce qui concerne ma vision de l'antisémitisme aujourd'hui. Ça s'appelle un doute et en l'absence de faits objectifs, c'est admis en philosophie !
(J'ai déjà admis que ma perception de l'antisémitisme en France pouvait être erronée, pourquoi revenir là-dessus ? Votre affirmation repose-t-elle sur les trois tarés de l'affaire Fofana, font-ils à eux seuls "l'opinion française" ? Si c'est tout ce que vous avez comme référence pour clamer que l'antisémitisme augmenterait, vous ne me convaincrez pas.)

Pour l'Histoire, c'est pareil. Il s'agit de lire ce que j'ai dit. Je n'ai jamais affirmé qu'il n'y aurait pas d'Histoire, c'est absurde de balancer ça sans précaution (et de s'en servir). J'ai expliqué à Euterpe que prendre en compte une période (1880) où l'on en était à exposer des noirs en cage (Exposition Universelle de 1889) pour justifier qu'il existerait un antisémitisme en 2014 était tout à fait fantaisiste, rien de plus. L'Histoire bien entendu, il n'y a même qu'elle en un sens : c'est parce qu'il y a eu la Shoah que le cas des juifs est un peu particulier. C'est parce qu'il y a eu la Shoah que je parle de racisme idéologique. Parce que ça a traumatisé les hommes, l'Occident en tous cas ; parce que ça l'a fait réfléchir sur lui-même ; parce qu'à partir de ce moment, tout le monde – oui, tout le monde – a dit : "plus jamais ça", à un endroit de conscience où l'on n'arrivait même plus à trouver de mots pour répondre à cette horreur.

Ensuite je n'oppose pas antisémitisme et racisme anti-musulman, je prends une précaution en disant que ce débat comporte un piège qui est celui de reporter sur les musulmans français la responsabilité d'une éventuelle montée de l'antisémitisme, et de les stigmatiser encore à travers un discours qui se veut au départ dénoncer toute forme de racisme. Je prends cette précaution - c'est tout - afin d'éviter toute ambiguïté (c'est ça et rien d'autre qui me rendait dubitatif).
… c'est pourquoi je ne tiens pas à insister trop longtemps sur le rapport des Français à l'Islam ; j'avais juste pris cet exemple pour illustrer était le racisme aujourd'hui !
Vite fait, disons que le Coran est une chose (tout à fait critiquable), l'Islam en est une autre, soit une culture... ou plutôt un ensemble de cultures bien différentes. Une différenciation que ne font pas forcément la masse des sondés quand on leur pose des questions aussi ambiguës...

Quant au "système" et sa "domination", non je ne suspecte pas le système de protéger plus les juifs que les musulmans, c'est ce que j'ai tenté de montrer avec mes différences entre formes de racisme. Et même si je trouve qu'on en a fait beaucoup avec cette histoire de Dieudonné, je ne trouve pas non plus "anormal" de montrer haut et fort un rejet définitif et sans concession sur toute forme de racisme idéologique qui pourrait avoir des accointances avec les thèses nazies.
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