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Autour d'une pensée de l'existence

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aliochaverkiev
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aliochaverkiev a écrit:
Oui la remise en cause du principe de causalité (uniquement dans l'absolu, car il ne s'agit pas ici me semble-t-il de le remettre en cause dans les cas où il opère avec efficacité) semble toucher des zones psychiques ultra-sensibles. Il est probable que ce principe structure des représentations très profondes, et la  remise en cause de ce  principe, même à la marge, semble avoir comme premier effet d'engendrer une certaine angoisse.


Pris superficiellement, peut-être. Mais à bien y réfléchir, les deux voies n'aboutissent-elles pas au même heurtoir : le fait qu'il y a expérience de ? Qu'il y a existence, pour retrouver le cadre et le sujet ?

Le vrai problème ne résiderait-il pas tant dans la définition du "monde" comme déterminé ou indéterminé que d'accepter que nous n'en saurons jamais rien, coincés que nous sommes dans notre cognition, la plus sûre des prisons de la raison ? Ainsi que l'extrait précédent le suggère, toute théorie physique globale (restons optimistes et admettons qu'une opinion commune soit possible à terme) sera à la merci de la réfutation, son caractère déterministe ou pas toujours en sursis. Malgré tout, nous sommes condamnés à trouver des causes et des effets pratiques, au quotidien, quant bien même le fond des choses (si jamais tel fond puisse exister) se voit en définitive déterministe ou indéterministe.

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Crosswind a écrit:
aliochaverkiev a écrit:
Oui la remise en cause du principe de causalité (uniquement dans l'absolu, car il ne s'agit pas ici me semble-t-il de le remettre en cause dans les cas où il opère avec efficacité) semble toucher des zones psychiques ultra-sensibles. Il est probable que ce principe structure des représentations très profondes, et la  remise en cause de ce  principe, même à la marge, semble avoir comme premier effet d'engendrer une certaine angoisse.


Pris superficiellement, peut-être. Mais à bien y réfléchir, les deux voies n'aboutissent-elles pas au même heurtoir : le fait qu'il y a expérience de ? Qu'il y a existence, pour retrouver le cadre et le sujet ?

Le vrai problème ne résiderait-il pas tant dans la définition du "monde" comme déterminé ou indéterminé que d'accepter que nous n'en saurons jamais rien, coincés que nous sommes dans notre cognition, la plus sûre des prisons de la raison ? Ainsi que l'extrait précédent le suggère, toute théorie physique globale (restons optimistes et admettons qu'une opinion commune soit possible à terme) sera à la merci de la réfutation, son caractère déterministe ou pas toujours en sursis. Malgré tout, nous sommes condamnés à trouver des causes et des effets pratiques, au quotidien, quant bien même le fond des choses (si jamais tel fond puisse exister) se voit en définitive déterministe ou indéterministe.

Ce que vous avez écrit (ainsi que le message de Kercoz citant Boudou) donne à réfléchir. Ce sont des sujets ouverts, intéressants parce qu'ils sont ouverts. Ils provoquent et réflexion et sentiment de nécessité de s'informer (notamment sur les représentations propres à la physique quantique). Mais même sans aller jusqu'à étudier la physique quantique, ce désir (je parle oui de désir!) de trouver une cause à tout est aussi notre lot quotidien dans nos rapports humains. Nous essayons toujours de trouver une cause aux événements politiques et économiques par exemple (et même aux événements affectifs), nous en trouvons toujours, même si chacun a une idée différente (!) des vraies (!) causes, nous cherchons des causes donc pour prédire l'avenir, pour anticiper les réactions des autres. Cette recherche est plus ou moins menée avec dogmatisme ou au contraire avec souplesse. Cette  recherche a des effets souvent positifs  (constructifs peut être convient mieux) quand vous laissez un peu ou beaucoup de liberté à l'autre, aux autres mais elle peut être moins constructive si vous êtes trop dogmatique, c'est-à-dire si vous ne laissez pas assez de liberté à l'autre. Ainsi dans la vie sociale il y a ce mélange de volonté déterministe et de don, de reconnaissance (volontaire) de liberté aux autres. La liberté alors est forcément vécue comme une infraction à la pure causalité, à votre causalité ! C'est ce qui fait le charme des rapports humains : l'impossibilité de tout prévoir de l'autre, non parce que le principe de causalité est inopérant en soi mais parce que vous décidez de ne pas tout soumettre à la détermination de votre raison. Les rapports humains ont besoin d'irrationalité. Ce besoin d'irrationnel peut être ici modestement limité aux seuls rapports affectifs si ma manière de penser les rapports humains en choquent certains. La philosophie devrait à mon sens, ne pas seulement s'occuper de la seule raison scientifique (finalement nous risquons d'être dévorés par les scientifiques) mais aussi s'occuper des rapports humains, de ce désir d'irrationalité propre aux hommes; l'homme est ce paradoxe : désir de rationalité mais aussi désir d'irrationalité.

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Je continue l'exposé.

Sartre est parti de cette constatation dans "l'Être et le Néant" : "Comment penser le néant ?" En posant quelque chose que je vais nier. Le néant n'est pas une entité en soi mais le produit d'une activité de ma pensée, d'une activité logique que l'on appelle la négation qui consiste à nier. Mais nier c'est toujours affirmer. Pour nier je dois d'abord poser la chose que je dois nier. Cela a des conséquences jusque dans l'éthique, puisque pendant longtemps les philosophes, les théologiens ont toujours affirmé que le mal n'existait pas.  Ce que nous appelons le mal n'est que par degrés successifs la négation, la privation d'un bien. 

Ce qui existe, l'être, équivaut au bien (La République, Platon). Quand nous faisons le mal, nous ne faisons que retirer le bien. ("Nul n'est méchant volontairement" Socrate).  Nous ne pouvons pas, puisque nous sommes la manifestation de l'être, rencontrer le néant sur le plan logique où le mal absolu comme entité serait mis en regard du bien. Nous sommes prisonniers de l'être.

Catégorie première qui est l'être avec des conséquences multiples et variées qui vont peser très lourd dans notre tradition, d'où la théorie platonicienne des Idées. Platon montre qu'un être tient son être, donc va avoir son essence propre, par participation à un degré plus ou moins parfait à l'Être lui-même.

Tout ceci doit se comprendre comme autant de conséquences et de résultats de cette place centrale que la métaphysique va conférer à l'être, d'où tout va émaner,  dont, tardivement, l'existence. Pourquoi tardivement puisque nous nous éprouvons d'emblée des êtres existants ? Qu'est-ce-qui me fait croire en ma propre existence ?

Nous sommes les héritiers d'une pensée qui installe l'être comme catégorie première, qui permet de poser la question suivante : "Y aurait-il quelque chose de défectueux dans l'existence ?  Qu'est ce qui peut conduire à la considérer comme un moindre être ?" Dans ce cas pourquoi assiste-t-on à un renversement des positions respectivement occupées par l'être et l'existence dans l'histoire ?

A partir du XVII siècle il y a un renversement des choses. Pourquoi progressivement le terme exister va être de plus en plus présent jusqu'à devenir le support de véritables pensées autonomes que l'on appellera pensées de l'existence ou pensées existentielles?  Toutes les philosophies existentialistes peuvent de ce point de vue se définir comme autant de tentatives pour assurer l'autonomie de l'existence par rapport à l'être, pour arracher l'existence  à l'être. Avec des stratégies diverses. Il faut bien comprendre quelles questions se posent et pourquoi elles se posent.

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kercoz a écrit:
Arcturus a écrit:
Ainsi dans la vie sociale il y a ce mélange de volonté déterministe et de don, de reconnaissance (volontaire) de liberté aux autres. La liberté alors est forcément vécue comme une infraction à la pure causalité, à votre causalité ! C'est ce qui fait le charme des rapports humains : l'impossibilité de tout prévoir de l'autre, non parce que le principe de causalité est inopérant en soi mais parce que vous décidez de ne pas tout soumettre à la détermination de votre raison.


C'est curieux comme on peut inverser le signifiant entre 2 individus.
Vous attribuez à la "raison" un caractère déterministe que je me permets de contester. C 'est la rigidité comportementale qui pourrait bénéficier de ce qualificatif. La raison , va , au contraire s'attaquer à ces déterminismes.
J' ai aussi du mal avec votre point de  du "charme" des rapports humains du fait de leur imprévisibilité.
Je vais passer par un exemple rural:
Quand je jardine dans mon potager, je souffre d' une sorte de phobie curieuse: la "peur du voisin". Non pas que j' ai de mauvais rapports avec eux, mais du fait que je ne sais quel comportement adopter lors d' un passage de voisin.
La première rencontre est assez facile à traiter. L' interaction doit s'effectuer dans une durée correcte correspondante a plusieurs facteurs comme l' historique de nos rapports, l' espacement de la précédente interaction, etc . Le second passage est plus compliqué: il ne faut pas repartir sur des considérations longues , mais dire un mot, un signe de tete , un sourir etc.. Qui doit parler le premier ? pour ne pas me gèner ou inversement, l' évitement est possible ( pas vu pas pris !), tourner le dos au passage s'il n' a pas vu que je l' ai vu etc ..
Toutes ces procédures et interactions étaient autrefois parfaitement règlées et rodées dès le plus jeune age.
Cet ancien  manque de liberté comportementale facilitait la vie et autorisait aussi l' interaction importante ( tu veux des plants de salades ?, ta fille va mieux ? ..)
L' individualisme moderne me semble cacher des tas de traumatismes règlés par des molécules là ou ces rigidité ( aliénations culturelles) faisaient très bien l' affaire.
Comme toujours je ramène tout sujet sous le point de vue structuraliste.

Débarrassons-nous un moment de ces mots, causalité, déterminisme, etc . pour en revenir à notre réalité psychologique. La raison c'est une faculté qui conduit les hommes à vouloir tout contrôler. (Quand je dis les hommes j'entends les femmes aussi).
Ce qui vous angoisse c'est de ne pas pouvoir tout contrôler. Vous êtes inquiet des réactions que vous ne contrôlez pas ou que vous ne pouvez pas anticiper.
Mais il y a aussi des personnes qui aiment ce côté incontrôlé parce qu'elles vont devoir inventer, s'adapter à toute vitesse, trouver l'inspiration. Certains aiment les situations absolument incontrôlées au préalable, ce sont souvent des joueurs ceux là. Le vrai joueur ne contrôle pas, ne veut pas contrôler, ou, plus exactement, il ne veut pas anticiper, utiliser les prédictions données par la raison. 
Si, un jour, l'univers est absolument compris et prédit, alors vous verrez se lever soudain, un homme , des hommes, dont le but, sera justement de casser toutes les prédictions. Au-delà de la raison l'homme est un créateur. Il est le génie créateur. Qui brise les certitudes, qui brise les sécurités, il est celui qui part un jour explorer les forêts inconnues, il est celui qui partira un jour dans l'espace quitte à y perdre la vie. Ce type d'homme aucune raison jamais ne le corsètera. Pour ces hommes la raison est un instrument mis au service de leur inspiration.

C'est pour cela que j'aime la philosophie des premiers, Empédocle par exemple :

"Les cavales qui m'emportent m'ont mené aussi loin que m'entrainait mon désir, et leur galop m'a conduit sur le chemin illustre de la Déesse qui partout guide le Sage.
Là je fus conduit, là, fut tiré mon char par les coursiers habiles. De jeunes vierges dirigeaient ma route. L'essieu brûlant, dans les moyeux stridait comme un flûte."

(Rapporté par Y. Battistini, Trois présocratiques, collection Idées, page 109)

Aujourd'hui nos philosophes, possédés par la seule raison, vont retraduire ces mots dans un langage rationnel. Et je demande : quand donc un philosophe complet retraduira enfin les discours rationnels en langage inspiré, poétique? Depuis Descartes la philosophie s'est amputée de la dimension  poétique en Occident (Nietzsche est à part, bien que tous tentent de le retraduire en langage dit rationnel, ce qui tue immédiatement la dimension poétique de son œuvre).

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Arcturus a écrit:

Aujourd'hui nos philosophes, possédés par la seule raison, vont retraduire ces mots dans un langage rationnel. Et je demande : quand donc un philosophe complet retraduira enfin les discours rationnels en langage inspiré, poétique? Depuis Descartes la philosophie s'est amputée de la dimension  poétique en Occident (Nietzsche est à part, bien que tous tentent de le retraduire en langage dit rationnel, ce qui tue immédiatement la dimension poétique de son œuvre).


J'illustrerais votre demande par cette citation d'Alfred de Musset : "Aimer est le grand point, qu'importe la maîtresse? Qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse."
 
 
Qu'apporte donc la poésie à la philosophie, sinon une dimension d'apparat ? Le sujet m'intrigue sincèrement : pourriez-vous trouver un exemple de texte poétique, philosophique, impossible à traduire rationnellement, car je ne vois pas ? Lorsque vous parlez de contrôle, si certains apprécient ce que l'on appelle communément l'improvisation, toute impro nécessite pour autant une part, si minime soit elle, de contrôle effectif sans lequel rien ne semblerait possible... Par ailleurs le langage, tout poétique qu'il puisse être, reste un contrôle permanent des mots. 

Aussi et enfin, que veut dire Empédocle ?

Dernière édition par Crosswind le Ven 13 Mai 2016 - 14:28, édité 1 fois
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