Aristippe de cyrène a écrit:La différence, c'est que si l'on dit que Dieu est dans la nature, alors on a l'impression que Dieu vit au sein de la nature. Il y a alors une séparation entre Dieu et la nature. Or, chez Spinoza, Dieu et la nature coïncident, c'est la même chose : Deus sive natura. ;)
A vrai dire si j’avais pu penser que certains pouvaient supposer que dieu vivait, j’aurais mieux pesé mes mots, d’autant que je n’imaginais pas qu’une telle interprétation puisse venir à l’esprit de quelqu’un pratiquant la philosophie. Mais il est vrai que la philosophie exige de la précision, et j’aurais dû dire au minimum : "Dieu est dans la matière de la nature", pour éviter sans doute ce malentendu.
Mais avoir précisé que "Dieu est la nature" ne nous a guère avancés quant à la liberté du sujet et sa volonté… d’autant plus que chez Spinoza l’autonomie du cogito a disparu avec la substance unique (il ne peut y avoir qu’une seule substance, qui est Dieu et tout ce qui est ne se comprend que comme un attribut, une modification de la substance) : avec lui la notion de sujet est absente (au sens moderne d’homme libre et autonome dans sa volonté d’agir dans l’existence). Il me semble d’ailleurs un peu curieux que le citoyen d’une démocratie moderne puisse se satisfaire de ces conceptions de la liberté conçues à une époque où la pensée était encore très empreinte de théocratie.
C’est pourquoi je faisais allusion à Kant qui, plus tard, aura une conception nouvelle du sujet et son "autonomie de la volonté" est plus adaptée, je trouve, à la pensée morale et juridique de notre époque : à côté d’une forme inférieure de la faculté de désirer, qui se détermine passivement en fonction des inclinations individuelles (la volonté au sens de Locke), il définit une forme supérieure de cette même faculté, caractérisée par son autonomie, c’est-à-dire par le pouvoir de se donner à elle-même sa propre loi. Loi qui, selon lui, inscrite ainsi au cœur de la nature humaine, commande de manière catégorique (impératif), imposant aux hommes un devoir moral qui est en même temps une manifestation de leur liberté "véritable". C'est davantage dans cette perspective que peut s'inscrire l'état de Droit qui caractérise nos sociétés démocratiques modernes.