Héraclite a écrit:Il est possible, et salutaire à mon sens, de remettre en question le "je pense donc je suis" de Descartes, puisque dans le sommeil profond sans rêves, nous ne pensons pas, et pourtant, nous sommes et nous existons ; par conséquent, la pensée, même si elle est un composant important de notre être, ne constitue pas un critère suffisant pour énoncer que "nous sommes", de façon objective, puisque cette pensée n'est pas permanente.
Ne faites pas dire à Descartes ce qu'il n'a pas dit. Cela s'inscrit dans un mouvement, dans la pensée, et précisément dans le doute. Or Descartes n'a pas écrit, je ne pense pas donc je suis, ou je ne pense que de temps à autre donc je suis.
Héraclite a écrit:Et le sommeil profond n'est qu'un exemple, car dans les méditations Bouddhistes ou Hindouistes, ou dans les arts martiaux intérieurs du Taoïsme chinois, l'homme est entraîné à un vide intérieur profond sans pensées, censé développer la conscience, la maîtrise et la connaissance de lui-même, ainsi que ses capacités spirituelles latentes.
Et dans ces philosophies, les différents états de conscience sont nommés et analysés, car il y a l'état de rêve conscient, l'état profond de sommeil sans rêve, l'état de sommeil avec rêve mais sans conscience du rêve, etc., puis, il y a les différents états de conscience liés à la méditation, ainsi, on est loin de la toute puissance de la pensée...
C'est faux. D'abord le vide intérieur ne développe pas la conscience. La conscience reste ce qu'elle est en tant que fonction. L'objet visé par la conscience prend différentes formes, mais la conscience ne change pas en elle-même. De plus, même chez des yogis de haut niveau, l'éradication totale de la pensée est une chimère. Ainsi ce n'est pas la conscience qui évolue, mais son objet.
Enfin une précision sur le rêve conscient. Il s'agit d'un état intermédiaire où pendant le sommeil paradoxal le sujet émerge à la conscience sans l'atteindre pleinement. Par ailleurs - et pour cette raison - la maîtrise du rêve n'intervient que sur une infime partie de celui-ci et non pas dans sa totalité. Ceux qui disent maîtriser totalement leurs rêves sont des menteurs.
Héraclite a écrit:Ainsi, Dienekes, le "je pense donc je suis" de Descartes est très subjectif, et c'est bien plutôt cette hypothèse qui est très coûteuse à l'homme, l'ayant privé de la recherche intérieure de sa véritable identité (le fameux "connais-toi toi-même"), puisque cette hypothèse suppose que la pensée permet de tout appréhender de notre identité profonde, ce qui est manifestement complètement faux, et constitue une entrave à l'étendue de nos possibilités de recherches.
"Connais-toi toi-même". Cette fameuse citation n'a rien à voir avec l'introspection. Elle signifie de ne pas se prendre pour un dieu. Et quand vous parlez d'identité profonde, il faudrait développer car en l'état ça ne veut rien dire.
Héraclite a écrit:Nul doute que le développement de la science avait besoin de cette étape pour s'épanouir pleinement, mais il n'en reste pas moins que cela constitue à un moment donné une limitation insupportable, car probablement fausse. (limitation qui stoppe le développement spirituel de l'homme, donc la connaissance de lui-même, en le poussant donc en sens inverse, vers l'ignorance intime de sa personne, ce qui apporte à terme : désarroi, faiblesse, tension, souffrance, et errances de toutes sortes, avec toutes les conséquences négatives que nous voyons dans le monde...).
Pour qu'il y ait développement spirituel il faudrait adhérer au spiritualisme…
Héraclite a écrit:L'hypothèse de Descartes, de la différence entre rêve et réalité, sur la base qu'un rêve serait décousu, et la réalité serait, elle, continue et cohérente, ne semble pas suffisante non plus, car il serait possible d'avoir des rêves conscients et maitrisés, continus et cohérents, suite à des pratiques méditatives.
Même remarque que supra pour la maîtrise du rêve.
Héraclite a écrit:Ce qui est intéressant dans ces philosophies du "vide sans pensées", c'est qu'elles concluent justement à la façon de Leibnitz, que nos perceptions actuelles sont bien un rêve, non pas parce que notre monde n'existerait pas, mais parce que nos capacités de perception actuelles sont partielles et limitées, non développées totalement : ce sont les séparations et limitations de temps et d'espace qui seraient illusoires, et non les choses en elles-mêmes. (d'où la notion de "vacuité").
Concernant la méditation et la "découverte" de la non limitation de l'espace est du temps, ce n'est pas à proprement parler une révélation. En effet il a été mis en évidence que pendant la méditation il y a une mise en sommeil des aires du cerveau qui permettent l'appréhension de l'espace et du temps. En aucun cas le méditant n'accède à une connaissance exogène à son propre état méditatif.
Héraclite a écrit:Quand la physique quantique énonce qu'il n'y a pas de séparation, dans l'infiniment petit, entre une table et nous, et que homme et table ne sont qu'une énergie continue et unie, et bien, cela correspond très exactement aux conclusions de ces philosophies ancestrales de non-dualité, qui assurent que "tout est 1", en Conscience réelle et épanouie. (car la pratique du vide sans pensées permettrait d'être conscient par nous-mêmes, en expérimentation intérieure, de cette unité fondamentale et immobile, sans temps et sans espace).
Laissez la physique quantique où elle se trouve, car vous parlez là d'intrication et la théorie de non-localisation est toujours débattue. Par contre ce que l'on sait, c'est que finalement, c'est-à-dire au-delà de la mesure relative et aléatoire, et donc de la probabilité, le principe de causalité et la théorie de la relativité sont respectés. On peut dire qu'il y a une théorie de physique quantique de la non-localité, mais on ne peut pas dire qu'il y a une physique de la non-localité. C'est toujours le même débat sur l'interprétation de la physique quantique.
Héraclite a écrit:Il est à noter que constater cette unité fondamentale de toutes choses et de tous êtres, ne constitue pas du tout un athéisme, ni un déisme, dans l'absolu, c'est simplement un recul face à des illusions de temps et d'espace, et une prise de conscience que l'énergie fondamentale de vie, et partant, notre conscience humaine, est unie et sans séparation réelle de temps et d'espace.
Non, ça c'est une simple croyance.
Crosswind a écrit:[...] la traduction courante de cogito ergo sum contient par deux fois le pronom personnel "je", ce qui introduit une immanquable nuance substantielle à la proposition cartésienne.
Et non des moindres...
Dernière édition par Vangelis le Mar 22 Sep 2015 - 18:24, édité 1 fois