Bonjour,
Il est possible, et salutaire à mon sens, de remettre en question le "je pense donc je suis" de Descartes, puisque dans le sommeil profond sans rêves, nous ne pensons pas, et pourtant, nous sommes et nous existons ; par conséquent, la pensée, même si elle est un composant important de notre être, ne constitue pas un critère suffisant pour énoncer que "nous sommes", de façon objective, puisque cette pensée n'est pas permanente.
Et le sommeil profond n'est qu'un exemple, car dans les méditations Bouddhistes ou Hindouistes, ou dans les arts martiaux intérieurs du Taoïsme chinois, l'homme est entraîné à un vide intérieur profond sans pensées, censé développer la conscience, la maîtrise et la connaissance de lui-même, ainsi que ses capacités spirituelles latentes.
Et dans ces philosophies, les différents états de conscience sont nommés et analysés, car il y a l'état de rêve conscient, l'état profond de sommeil sans rêve, l'état de sommeil avec rêve mais sans conscience du rêve, etc., puis, il y a les différents états de conscience liés à la méditation, ainsi, on est loin de la toute puissance de la pensée...
Ainsi, Dienekes, le "je pense donc je suis" de Descartes est très subjectif, et c'est bien plutôt cette hypothèse qui est très coûteuse à l'homme, l'ayant privé de la recherche intérieure de sa véritable identité (le fameux "connais-toi toi-même"), puisque cette hypothèse suppose que la pensée permet de tout appréhender de notre identité profonde, ce qui est manifestement complètement faux, et constitue une entrave à l'étendue de nos possibilités de recherches.
Nul doute que le développement de la science avait besoin de cette étape pour s'épanouir pleinement, mais il n'en reste pas moins que cela constitue à un moment donné une limitation insupportable, car probablement fausse (limitation qui stoppe le développement spirituel de l'homme, donc la connaissance de lui-même, en le poussant ainsi en sens inverse, vers l'ignorance intime de sa personne, ce qui apporte à terme : désarroi, faiblesse, tension, souffrance, et errances de toutes sortes, avec toutes les conséquences négatives que nous voyons dans le monde...).
L'hypothèse de Descartes, de la différence entre rêve et réalité, sur la base qu'un rêve serait décousu, et la réalité serait, elle, continue et cohérente, ne semble pas suffisante non plus, car il serait possible d'avoir des rêves conscients et maîtrisés, continus et cohérents, suite à des pratiques méditatives.
Ce qui est intéressant dans ces philosophies du "vide sans pensées", c'est qu'elles concluent justement à la façon de Leibnitz, que nos perceptions actuelles sont bien un rêve, non pas parce que notre monde n'existerait pas, mais parce que nos capacités de perception actuelles sont partielles et limitées, non développées totalement : ce sont les séparations et limitations de temps et d'espace qui seraient illusoires, et non les choses en elles-mêmes (d'où la notion de "vacuité").
Quand la physique quantique énonce qu'il n'y a pas de séparation, dans l'infiniment petit, entre une table et nous, et que homme et table ne sont qu'une énergie continue et unie, et bien, cela correspond très exactement aux conclusions de ces philosophies ancestrales de non-dualité, qui assurent que "tout est 1", en Conscience réelle et épanouie (car la pratique du vide sans pensées permettrait d'être conscient par nous-mêmes, en expérimentation intérieure, de cette unité fondamentale et immobile, sans temps et sans espace).
Il est à noter que constater cette unité fondamentale de toutes choses et de tous êtres, ne constitue pas du tout un athéisme, ni un déisme, dans l'absolu ; c'est simplement un recul face à des illusions de temps et d'espace, et une prise de conscience que l'énergie fondamentale de vie, et partant, notre conscience humaine, est unie et sans séparation réelle de temps et d'espace. Ainsi, parler d'athéisme et de déisme dans le cadre d'une telle prise de conscience, d'une telle connaissance de sa nature intime, n'aurait pas forcément de sens, et ne ferait que référence à des concepts relatifs que l'on aura choisi, et en particulier, à la définition qu'on donnerait de Dieu...
Comme disait un célèbre sage de l'Inde : "ne parlez pas prématurément de Dieu à tort et à travers, car tout est en nous, ainsi, connaissez-vous vous-même, et ensuite, quand vous saurez vraiment qui vous êtes, vous verrez bien si la question de Dieu se pose toujours, et en quels termes..."