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Controverse de Valladolid (1550-1551)

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4 participants

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Dienekes a écrit:
La bulle ne laisse plus place à l'interprétation...

C'est exact. Mais si l'on considère que cela a été tranché, alors il faut admettre qu'il y a eu disputation à un moment ou un autre. Je peux me tromper mais je n'ai pas connaissance de débat concernant l'âme chez les indiens, les africains ou les asiatiques. Dans ce cas il vaudrait mieux dire qu'il était admis que tous les peuples humains avaient une âme et que ce n'était pas même une question, encore moins à Valladolid.
Et effectivement, si quelqu'un avait des références à ce sujet, il serait le bienvenu.

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Oui, je vois ce que vous voulez dire. Voici quelques éléments de réponse provenant d’une note de l’ouvrage (extrait de la note 88 p294-295)

N. Capdevila a écrit:
[…] La bulle a été sollicitée à Rome par le dominicain Bernardino de Minaya pour obtenir une condamnation officielle des déclarations du dominicain Domingo de Betanzos sur l’incapacité des Indiens à recevoir la foi (le texte de sa rétractation sur son lit de mort est cité par L. Hanke, La humanidad es una p.205-206) et surtout celle de l’esclavage des Indiens. Le 2 août 1530, Charles Quint avait interdit l’esclavage, même à la suite d’une guerre juste ou en les achetant aux Indiens (R. Konetzke, Coleccion de documentos t.I, p135). Le bref Pastorale Officium du 29 mai 1537, adressé à l’archevêque de Tolède Juan de Tavera, félicite l’empereur pour cette décision (Bartolomé de Las Casas Obras completas II 355-357). Mais le décret anti-esclavagiste avait été abrogé le 20 février 1534 à l’instigation du président du conseil des Indes Garcia de Loaysa. Il aurait favorisé la résistance des Indiens et maintenu dans l’idolâtrie des esclaves indiens possédés par des Indiens alors qu’ils auraient pu être convertis grâce à leur achat par des chrétiens (R. Konetzke, Coleccion de documentos t.I, p154). Charles Quint a donc protesté contre l’intervention de Paul III et obtenu un bref de révocation (Non indecens videtur du 19 juin 1538). Le problème qui divise les historiens est de savoir si Paul III a aussi révoqué la bulle de 1537. Paul III se réfère au bref de 1537, mais son contenu est fondamentalement identique à celui de la bulle. L’empereur s’était bien opposé à la bulle et au bref, mais selon G. Gutiérrez il n’a pas obtenu ce qu’il a demandé (voir En busca de los pobres de Jesucristo p436-440 ; en sens contraire, voir J. Dumont, La vraie controverse de Valladolid p88). […]


Dernière édition par Dienekes le Sam 26 Juil 2014 - 18:57, édité 1 fois

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Dans le fond, cette célèbre controverse peut être vue comme une lutte de pouvoir entre Dominicain et Jésuites. La nature pousse l'homme comme elle l'a fabriquée, sans dévier. Le pouvoir est une loi naturelle qui ne change pas. Nous voyons ici un ordre religieux dont la vocation est d'être les prêcheurs de l'église, qui prend le contrôle d'un monde nouveau. 
Alors qu'ils font partie des ordres mendiants, voilà nos frères seuls au pouvoir. Au Mexique, j'ai visité une église consacré à leur saint fondateur, Dominique, dont l'architecture extérieure ressemblait à un petit Kremlin austère.

Santo Domingo de puebla.

Autour, il faut imaginer sans transition une population colonisée et misérables. L'intérieur est assez austère, sauf le magnifique retable doré. 

http://www.donsandro.nl/mexico/Mexico/puebla-santo%20domingo-1a.jpg

Au fond à droite, un petite porte ouverte dans une plus grande, massive. Je suis entré sur l'injonction du guide. J'ai vu pas mal de baroque en Europe centrale, souvent blanc et or. Mais là, il n'y a ni blanc ni argent...

http://static.panoramio.com/photos/large/3849483.jpg
http://shadowness.com/file/item2/39246/image.jpg
http://static.panoramio.com/photos/large/13493148.jpg

C'est tout de l'or. On est totalement écrasé. Quel choc! voilà dans quoi vivait cet ordre mendiant au milieu de la misère, les fameux ors du pouvoir. Les Jésuites étaient au contraire un ordre récent, austère, composé de soldats du Christ luttant contre cette misère, soudainement confrontés à cette église plus ancienne, de Dieu tout puissant.
La controverse de Valladolid oppose aussi l'église du Christ à celle de Dieu le père, comme s'oppose la gauche à la droite. Si vous visitez Saint Pierre, vous y verrez plus de statues de papes que de Christ en croix (mais celui de l'entrée est La Piéta!). Le pape actuel est le premier jésuite!
Il me semble que c'est en ce sens que la controverse de Valladolid trouve son universalité. Elle représente un des principes de la mécanique naturelle qui nous porte et qui garantit le mouvement. Même dans l'église, même à cette époque, même en terra incognita, deux sens contraires s'affrontent. Comme le neutron à l'electron et moi à moi-même.

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louispascal a écrit:
Dans le fond, cette célèbre controverse peut être vue comme une lutte de pouvoir entre Dominicain et Jésuites.


J’ai du mal à voir ce qui vous fait soutenir cela. Pour commencer, Las Casas lui-même est Dominicain. Qu’est-ce qui vous fait penser qu’une lutte entre ces deux ordres intervient dans ce débat ?

Le fond, comme le précisait Eunomia, c’est la justification de la conquête. Avant même la controverse, cette justification se faisait de deux façons :
• Par la théorie de la non-possession qui postulait que la terre des Indes n’appartenait pas aux Indiens et était donc à prendre par les Espagnols (cf. le Requierimento)
• Par la théorie de la dépossession qui postulait que cette terre appartenait bien aux Indiens, mais qu’il était possible de les en déposséder selon certaines circonstances qui permettent le déclenchement d’une "guerre juste". (cf. Francisco de Vitoria, De indis).

Là-dessus, nos deux protagonistes vont se positionner de la façon suivante :
• Sepulveda propose une approche que l’on pourrait qualifier d’impérialisme humaniste en se basant, entre autre, sur l’un des arguments de Vitoria : pour faire simple, il convient d’asservir les Indiens pour leur propre bien, pour les faire sortir de la barbarie ;
• Las Casas conteste les visées impérialistes développées par Sepulveda, mais ce faisant il doit marcher sur une corde raide, coincé entre des intérêts impérialistes faciles à comprendre au sein même de la couronne et  l’impossibilité de renier frontalement les visées humanistes développées par Sepulveda.

Ce positionnement confère à ce texte une actualité assez savoureuse…

Concernant la question de l’âme des Indiens, il me semblait que Lévi-Strauss mentionnait quelque chose sur ce sujet dans Race et histoire, j’ai retrouvé le passage :

Claude Lévi-Strauss - Race et histoire a écrit:
Dans les Grandes Antilles, quelques années après la découverte de l’Amérique, pendant que les Espagnols envoyaient des commissions d’enquête pour rechercher si les indigènes possédaient ou non une âme, ces derniers s’employaient à immerger des blancs prisonniers afin de vérifier par une surveillance prolongée si leur cadavre était, ou non, sujet à la putréfaction.


Malheureusement, je n’ai aucun renvoi vers une référence concernant ce passage.

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louispascal a écrit:
Dans le fond, cette célèbre controverse peut être vue comme une lutte de pouvoir entre Dominicain et Jésuites.


Je rejoins Dienekes. Si Las Casas ne devient dominicain qu’en 1523, son retour en Espagne en 1519 vient de la rupture qui s’opère entre ses positions et le reste des clercs, sans distinction d’ordre. Les Jésuites arrivent plus tardivement aux Amériques. La lutte est bien postérieure à Valladolid, et ne concerne pas la question des âmes ou de la conquête.
D’autant que pour être complet, il faut ajouter les franciscains qui prônent une évangélisation douce, par les images. L’opposition est loin de se résumer à une dichotomie dominicain/jésuite. Encore plus fondamentale est l’opposition entre encomienderos et clercs réguliers au sujet de l’évangélisation ! Montesinos sera un pamphlétaire formidable des excès et de l’abandon de cette mission dans les Antilles.  

Dienekes a écrit:
Là-dessus, nos deux protagonistes vont se positionner de la façon suivante :
• Sepulveda propose une approche que l’on pourrait qualifier d’impérialisme humaniste en se basant, entre autre, sur l’un des arguments de Vitoria : pour faire simple, il convient d’asservir les Indiens pour leur propre bien, pour les faire sortir de la barbarie ;

Il faut aussi parler du millénarisme qui fait fureur à cette époque. L’évangélisation des Indiens va absoudre les pèches de l’Europe pervertie. S’ajoute le devoir d’évangélisation des Rois catholiques.  

Dienekes a écrit:
• Las Casas conteste les visées impérialistes développées par Sepulveda, mais ce faisant il doit marcher sur une corde raide, coincé entre des intérêts impérialistes faciles à comprendre au sein même de la couronne et  l’impossibilité de renier frontalement les visées humanistes développées par Sepulveda.


Las Casas aura une influence notable tout de même, avec les Lois nouvelles de 1542 et l’évangélisation qui revient aux clercs.
 

Dienekes a écrit:
Malheureusement, je n’ai aucun renvoi vers une référence concernant ce passage


Ne faut-il pas ajouter une différence d’appréciation entre les habitants des Antilles (les noms propres m’échappent totalement) et les Aztèques/Incas qui fascineront littéralement les conquistadors ?
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