A vrai dire je pointais plutôt l'excès inverse, même si la conséquence est la même (on ne pense plus la différence), à savoir celui de trop animaliser l'homme pour revaloriser l'animal, au risque aussi de privilégier l'animal par rapport à l'homme, quitte à faire de l'homme un bourreau que l'on voudra culpabiliser en en faisant l'animal le plus mauvais du règne animal - ce qui toutefois reviendrait à légitimer son comportement, naturalisé, à l'égard des autres animaux. Bref, il existe une dérive "fasciste" de l'écologie, mais elle est inconsistante car contradictoire : l'animal a plus de dignité que son agresseur, l'homme ; mais 1) c'est rejeter l'animal homme alors qu'on veut revaloriser l'animal en mettant l'homme, son égal, au même niveau, d'où 2) il n'y a pas égalité mais nouvelle hiérarchie à la faveur de l'animal et 3) possibilité de naturaliser la violence de l'homme, donc de reconnaître qu'il peut naturellement exercer sa force et sa domination sur les autres animaux, d'autant plus qu'il n'est pas un animal comme les autres, ou bien encore 4) éradiquons l'homme puisqu'il est dangereux. De toute façon, 5) on ne pense plus l'homme en tant que tel, sa singularité, puisqu'il est réduit à ses besoins, son animalité, sa violence, sa force. Mais si l'homme est un animal, et si l'animal est un homme comme les autres, pourquoi vouloir détruire ou punir, ou simplement dévaloriser l'humanité ? N'est-ce pas finalement aller contre l'animalité ?
Au contraire, il me semble qu'il faut dire que l'homme est un animal, mais pas n'importe lequel, qu'il est un animal singulier et que l'humanité diffère de la simple animalité ; tandis que l'animal n'est pas non plus rien, même s'il n'est pas humain. Mais la différence n'implique pas une supériorité de l'homme, sinon dans ce qui lui est propre, à savoir la responsabilité relevant de la moralité, laquelle découle de la liberté et de la conscience réflexive qui prennent appui sur une strate ontologique réelle. Par ailleurs, l'intelligence n'est pas le propre de l'homme, ce serait au contraire la pensée, qui implique elle-même une responsabilité (notamment en ce que l'homme se découvre fragile, il est un animal fou ou malade) à l'égard de ce qui constitue les relations et conditions nécessaires à la vie humaine. Par exemple, l'environnement et la faune qui le compose. L'homme, inapte à vivre, a inventé la raison comme instrument, comme béquille, pour maîtriser le monde en le calculant. Mais il ne diffère pas en ce sens de l'animal. Il forme un monde d'habitudes en vue de l'action pour survivre dans un monde incertain.