aristippe de cyrène a écrit: Vous-même, parlez-vous plusieurs langues ?
Quatre, deux couramment, une pour laquelle il me faudrait à nouveau un mois ou deux pour parler en marchant, et l'autre comme une vache espagnole parlant l'anglais en Arménie. Mais la multiplication des langues et des notions fait que je lis assez facilement le portugais, que je me débrouille avec le roumain, etc.
aristippe de cyrène a écrit: je ne vois pas comment notre langue peut influencer notre pensée, auriez-vous un exemple pour m'éclairer sur ce point ?
Au hasard. Nous rendons l'expression anglaise : "I miss you", par : "tu me manques". Cette traduction n'est pas bonne, car on passe d'une habitude de pensée, qui est marquée dans l'ordre de la proposition, à une autre. L'Anglais dit littéralement : "je manque de toi" (on peut même aller jusqu'à une proposition du type : "je te manque", au sens où on dit qu'on manque une cible. C'est bien le sujet "je" qui se rapporte à quelqu'un, en parlant de lui-même. Le Français dit littéralement l'inverse de ce qu'il pense en disant ce qu'il dit et qu'il dit mal, puisqu'il parle comme le ferait Tarzan, la grammaire en plus, le sens en moins : "toi manquer (à) moi". Bref, le Français parle de lui en parlant d'un autre, quand il dit ça, quand l'Anglais parle de lui à un autre. Eh oui ! les Anglais n'ont pas de problème avec l'altérité (régime mixte, mœurs sans doute les plus libérales du monde, etc.). D'une manière générale, allez à la pêche aux idiomes, c'est croustillant, ou comparez les transpositions des proverbes et autres phrases toutes faites, on s'amuse beaucoup en s'instruisant de la sorte. Si ça vous chante (je le fais de temps à autre pour me divertir) achetez des mots croisés dans les langues étrangères, cette gymnastique intellectuelle a son efficacité.
aristippe de cyrène a écrit: pour lui, il y a un mécanisme d’apprentissage qui préexiste et qui rend possible l’acquisition d’une langue. Ce qui le conduit à avancer l’idée qu’il y a une grammaire universelle, c'est cela non ?
C'est même plus que dans le mécanisme d'apprentissage, puisqu'il suppose que, ce mécanisme étant propre à toutes les langues, c'est donc dans la langue elle-même, quelle qu'elle soit, qu'on doit pouvoir trouver de quoi inventer une grammaire universelle.
Liber a écrit: Le latin me semble avoir les deux qualités. Vous avez une multitude impressionnante d'expressions codifiées, qui nous viennent d'un fonds oral qui a été mis très tôt par écrit dans les sénatus-consultes. Mais cela n'empêche pas que la syntaxe latine soit d'une très grande complexité, sauf qu'elle est dans le même temps très rigide, comparée au grec par exemple. Quand vous faites du thème latin, vous vous apercevez que vous avez besoin à la fois de connaître sur le bout des doigts toutes les règles de syntaxe, souvent très fines, et d'un autre côté, vous devez avoir recours au dictionnaire pour chaque expression, à moins d'être déjà très érudit en la matière.
Ah Liber ! Vous me donnez envie de m'y replonger. Je m'étais débarrassé de toutes mes grammaires latines il y a quelques années, pour les racheter il y a deux ans. Mais, puisque je réserve la plus grosse partie de mes étés à la civilisation romaine, je crois que je vais me concocter quelques exercices du genre que vous décrivez !