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- Silentio
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Re: Désordres et désir
Jeu 2 Aoû 2012 - 1:22
Cioran est clairement un penseur et un écrivain. On ne peut pas vraiment dire qu'il ait des idées, encore moins qu'il ait créé des concepts ou un système philosophique. Cioran c'est un style, une humeur.
- Liber
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Re: Désordres et désir
Jeu 2 Aoû 2012 - 9:04
Alors son humeur le sauve de n'être qu'un intello, car quelqu'un qui émet des idées sans chair, tombe sous le coup de la définition de l'intello donnée par Euterpe.@Silentio a écrit:Cioran c'est un style, une humeur.
- Silentio
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Re: Désordres et désir
Jeu 2 Aoû 2012 - 9:49
Vous voulez dire qu'il ne cesse de parler du suicide sans jamais mettre en pratique cette idée ? :lol:
- Liber
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Re: Désordres et désir
Jeu 2 Aoû 2012 - 10:08
Disons qu'il se donne de la consistance à peu de frais. Si j'avais un reproche à faire à Cioran, ce serait d'être un peu trop monocorde. Gide reprochait à La Rochefoucauld de ne voir chez l'homme que la vanité comme cause de tous ses faits, gestes et pensées. L'écrivain devrait imiter la variété de la vie. C'est aussi le reproche que fait Kant à l'art, de n'être pas aussi varié que la nature. Cependant, on pourra toujours lui répondre que l'art peut fort bien contrecarrer la nature. On a aussi bien des Shakespeare et des Tolstoï que des La Rochefoucauld et des Cioran, les premiers agrandissant toujours plus leur horizon, les autres le restreignant le plus possible.@Silentio a écrit:Vous voulez dire qu'il ne cesse de parler du suicide sans jamais mettre en pratique cette idée ? :lol:
Re: Désordres et désir
Jeu 2 Aoû 2012 - 13:25
Le cas Cioran est intéressant parce que s'il semble donner un tour intellectuel à son œuvre (mais la chose est quand même tardive, chez lui), c'est précisément pour des raisons qui n'ont rien d'intellectuel, et uniquement tirées de son existence et de la conception qu'il s'en faisait. La vie étant irréductible aux idées, incompréhensible, ne reste que la certitude de la mort. De sorte que vivre, ou bien ne peut consister qu'en un acte de foi (presque une folie), ou bien est pure inauthenticité. L'écriture seule peut être authentique, puisque le seul objet de son œuvre est la mort (la vérité). Ainsi, Cioran ne choisit pas d'échapper à la vie en écrivant, mais bien d'échapper à la vie comme falsification de la mort. Il a beaucoup raffiné sur le style, mais on ne doit pas oublier que le français n'est pas sa langue maternelle et qu'il ne l'a appris que dans les livres. Ça contribue beaucoup à nous le rendre "écrivain" ou intello qui joue avec des coquillages.@Liber a écrit:quelqu'un qui émet des idées sans chair, tombe sous le coup de la définition de l'intello donnée par Euterpe.
Oui mais vous comparez écriture littéraire et écriture philosophique, dont la fonction n'est pas d'imiter la vie. La fonction de l'écriture philosophique est beaucoup plus réduite que celle de l'écriture littéraire, d'où les critiques auxquelles s'exposent des gens comme Cioran.@Liber a écrit:Disons qu'il se donne de la consistance à peu de frais. Si j'avais un reproche à faire à Cioran, ce serait d'être un peu trop monocorde. Gide reprochait à La Rochefoucauld de ne voir chez l'homme que la vanité comme cause de tous ses faits, gestes et pensées. L'écrivain devrait imiter la variété de la vie. C'est aussi le reproche que fait Kant à l'art, de n'être pas aussi varié que la nature. Cependant, on pourra toujours lui répondre que l'art peut fort bien contrecarrer la nature. On a aussi bien des Shakespeare et des Tolstoï que des La Rochefoucauld et des Cioran, les premiers agrandissant toujours plus leur horizon, les autres le restreignant le plus possible.
J'ajoute que le reproche de Gide s'explique par un motif personnel et philosophique plutôt que littéraire. Gide, qui était écrasé de culpabilité, et qui avait besoin de "narcissisme" pour respirer un peu dans l'étouffoir moral où il vivait et d'où il venait, ne pouvait décemment pas supporter le jansénisme implacable d'un La Rochefoucauld, qui n'offre guère de porte de sortie.
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