Une démocratie peut mener au despotisme, aussi bien quand le souverain qui concentre le pouvoir dans ses mains et l'exerce dans ses intérêts est une minorité à la tête de l'État que lorsqu'il y a une forme de dictature de la majorité du peuple sur l'ensemble de la société, écrasant alors toute dissidence. Mais la minorité peut instrumentaliser son discours en visant ses propres fins tout en prétendant agir au nom de l'intérêt du plus grand nombre. Or en Chine la population est éduquée, à coup de propagande, à se soumettre à l'État qui est rendu légitime puisqu'il viserait le bien commun. Mais on a éduqué les Chinois de manière à ce qu'ils se reconnaissent dans l'État et qu'ils ne sachent pas vouloir autre chose que cette domination étatique exercée sur eux et à laquelle ils travaillent. Il faudrait une éducation libérale pour qu'ils soient en mesure de distinguer par eux-mêmes ce qu'ils veulent, de procéder à des jugements politiques et d'influencer les partis et leur offre politique. Mais la servitude volontaire est renforcée par le fait que le Parti promet le bien-être au peuple : certes, les Chinois ont la chance de voir leur pays émerger, une classe moyenne se développe, mais à quel prix ? Et pourquoi voudraient-ils être libres, pouvoir décider de leur gouvernement, c'est-à-dire avoir la possibilité de changer une politique efficace ? Et comment la classe moyenne pourrait-elle vouloir la liberté pour les exploités qui triment dans l'anonymat le plus complet et qui assurent les conditions de ce développement économique qui profite à tout un pan de la population au détriment d'un autre (voyez, d'ailleurs, combien les manifestations de travailleurs sont réprimées par l'armée) ? Quant au pouvoir, il est accaparé par l'État, lui-même instrument de domination du Parti via la bureaucratie et l'armée. (En ce qui concerne le système des grands électeurs, on ne peut parler de démocratie puisqu'il n'y a pas d'égalité politique entre les citoyens et le titre qui permet de voter s'appuie, je suppose, sur la fortune et sur l'influence que l'on a dans le Parti. On pourra toujours dire que la France a connu le vote censitaire et ce système des grands électeurs, et qu'on appelait ça à l'époque la démocratie, il ne semble pourtant pas que cela soit acceptable parce que le corps électoral représente bien plus un ensemble d'intérêts financiers que le corps civil lui-même qui ne peut accéder au vote ; par ailleurs, sans le pluralisme on ne peut parler de démocratie ou de liberté politique : quelles que soient les différentes tendances communistes on reste au sein du même Parti, sans possibilité de le contester.)