fripouille a écrit:Ce qu'est le réel en dehors de notre représentation, en dehors de nos appareils de mesure, est, pour les physiciens quantiques de notre temps, un non-sens
Pour les physiciens quantiques uniquement. Encore faudrait-il expliquer ce qu'ils entendent par "non-sens", et ne pas oublier le point de vue du profane, qui n'a pas beaucoup changé depuis la nuit des temps, parce que ce qu'on pourrait appeler le "capital empirique" des hommes est extraordinairement stable et bien partagé. C'est beaucoup plus qu'un argument contre la physique quantique. On ne va pas renoncer à un point de vue qui a plusieurs millénaires de bons résultats derrière lui pour satisfaire le point de vue quantique. Enfin, la seule question de savoir ce qu'on appelle "le réel en dehors de notre représentation" est fondamentale ; on ne s'en débarrasse pas comme ça, d'autant que la manière dont vous le dites inciterait presque à admettre une équivalence entre représentation et appareils de mesure.
fripouille a écrit:Et si au bout du compte, dans l'infiniment petit, il ne restait plus que des relations, l'homme arriverait-il encore à nommer le réel ? Car ce qui est le plus problématique pour l'homme de la rue serait d'avouer que le réel n'a plus rien de solide ni de palpable.
Même pour l'homme de la rue ce n'est pas forcément difficile, intellectuellement. Après tout, de Leucippe à Lucrèce, l'atomisme pouvait sembler dématérialiser le monde aux yeux d'un quidam. C'est pourtant un matérialisme réel et convaincant, très fin, capable de considérer ce que la matière a de subtil, de moins "massif".
fripouille a écrit:Je connais cette vidéo qui est intéressante mais tout en étant bien axée, elle n'approfondit pas assez le problème.
Ce n'est pas le but. C'est un cours de licence, ne l'oublions pas, pédagogiquement conçu, avec, comme souvent, une présentation historique pour poser les termes du problème. L'objectif n'est pas de "progresser" dans les connaissances mathématiques et physiques du monde, mais de proposer, in fine, un état des lieux compréhensible. On nous propose de considérer que les mathématiques sont construites, plutôt que la découverte de choses existant a priori ; on nous présente avec clarté le rapport entre mathématiques et empirisme ; on nous explique bien en quoi la science ptolémaïque, d'un point de vue descriptif, est viable ; etc.
fripouille a écrit:Les intervenants développent une problématique de surface mais n'évoquent que très superficiellement le rapport entre le formalisme mathématique et la physique quantique.
Ça implique de tricher un peu avec la question, d'y répondre avant même de la poser, puisque votre remarque, me semble-t-il, implique d'admettre qu'il n'y a que des ondes (et, si j'ai bien compris, le formalisme mathématique, c'est des mathématiques ondulatoires, non ?). Ça ne me semble pas très inductif comme approche. Pour un profane (et c'est comme tel que j'interviens ici) c'est quand même un peu difficile à admettre, au seul motif qu'il ne comprend rien à la physique quantique et que, parce que des scientifiques lui parlent en chinois (certains même exigeant sans autre forme de procès de balayer nos "concepts macro-physiques"), ils auraient forcément raison. Quid de la matière ? Comme le dit l'un des interlocuteurs à la fin du cours vidéo, il faut "croire en l'existence du monde externe, sans quoi on ne se donne pas la peine de chercher" ; or qu'est-ce que ce monde externe sinon le monde tel qu'il est empiriquement accessible ?
Recourons à des questions de profane, un peu en vrac. Quand on se prend un poteau dans la figure, la douleur est-elle une erreur d'interprétation ? Y a-t-il une question d'échelle et, si c'est le cas, comment la formule-t-on ? Quid de la théorie de la relativité et de la question de son incompatibilité avec la physique quantique ? La matière ne serait-elle qu'une sorte de concrétion de l'énergie, un état de l'énergie ?
Dernière édition par Euterpe le Sam 30 Juil 2016 - 14:26, édité 1 fois