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Mélancolie intelligente

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Intransigeance
7 participants

descriptionMélancolie intelligente - Page 6 EmptyRe: Mélancolie intelligente

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Intransigeance a écrit:
Il s'agirait donc davantage d'une pathologie?

Je vois personnellement la mélancolie comme une maladie (quoiqu'il faudrait bien définir ce qu'est une maladie avant d'affirmer que la mélancolie en est une...) D'ailleurs il me semble qu'elle a longtemps été considérée comme telle, et que jusqu'au 18e siècle, on la considérait comme incurable, on pensait que la fin de la mélancolie était la mort.

Intransigeance a écrit:
la mélancolie est susceptible d'être soignée, si seulement le sujet le veut bien

On ne se débarrasse pas de la mélancolie comme d'une petite tristesse passagère... Il ne suffit pas de lui opposer une joie pour parvenir à la vaincre. Car la mélancolie est une sorte de complexe ambigu qui fait que chaque mélancolique n’est en fait malade que de son humanité. Chaque mélancolique a sa propre mélancolie qui correspond à sa propre vie. C'est pour cette raison que la mélancolie n’est pas une chose simple qui se définit avec une cause, une conséquence, un début, une fin, etc.

Intransigeance a écrit:
mais je ne doute pas un seul instant qu'il ne puisse s'en extraire et en faire une arme pour son bonheur futur.

Mais peut-être le mélancolique ne doit pas chercher son bonheur comme vous le dites en s'extirpant de la mélancolie, mais justement en s'y enfonçant encore plus, en cherchant profondément des réponses, en en tirant quelque chose...

descriptionMélancolie intelligente - Page 6 EmptyRe: Mélancolie intelligente

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Aristippe de cyrène a écrit:
Euterpe a écrit:
le peintre se contentait de peu pour dire beaucoup

C'était tout à fait le style de l'époque non ? Au 17e siècle, la sobriété était de mise...
Ça dépend des pays. Leurs chronologies respectives ne sont pas complètement superposables. Au même moment, l'Italie en est au baroque. Or la sobriété n'est pas le propre du baroque, au contraire. C'est une époque angoissée, passionnée. Le Grand Siècle ne doit pas faire illusion. Par exemple, si c'est l'âge d'or du théâtre français, l'opéra naît à la même époque à Florence. Les Italiens sont moins intellectuels que les Français, et plus expressifs aussi. Les passions raciniennes ne les échaudent pas, il leur faut une intensité dramatique plus débridée, musicale.

Aristippe de cyrène a écrit:
Euterpe a écrit:
elle n'est que l'opinion de Marcel, et elle le sera tant que Marcel ne comprendra pas que Popol n'est pas dans l'opinion.
C'est une question qui m'a toujours taraudé avec le beau : comment dire que quelque chose est beau sans qu'en même temps on puisse nous accuser d'opiner ? Comment passer au-delà de l'opinion quand on juge une œuvre ? Et comment différencier celui qui opine de celui qui n'opine pas ?
Les amateurs comme Burckhardt ne passent par leur temps à énumérer ce qui est beau ou pas. Ils s'intéressent aux œuvres pour elles-mêmes, ils disent ce qu'elles sont, ce qu'elles montrent. La plupart des gens qui jugent belle ou laide telle ou telle chose, telle ou telle œuvre, n'ont que très rarement quelque chose à en dire. Lisez Diderot, Stendhal, Baudelaire, Valéry. Mais lisez aussi les historiens de l'art, en premier lieu Wölfflin et Panofsky, mais aussi Chastel. Ils aident à faire voir ce que les œuvres montrent, encore une fois. Prenez n'importe quel texte de Bonnefoy consacré aux peintres. C'est toujours très personnel (pas subjectif), mais éclairant à chaque fois : aucun n'émet un avis, tous parlent de quelque chose ; et quand ils prononcent un jugement, d'accord ou pas, ça n'a plus aucune espèce d'importance ou d'influence sur le lecteur, parce que le lecteur a été guidé (cf. la démarche du Cicérone). Ce que les gens admettent spontanément pour les connaissances techniques ou scientifiques, ils ne l'admettent jamais pour les connaissances artistiques ou esthétiques, ça ne leur vient que très peu à l'esprit. Si j'ignore les mathématiques, je suis réduit au silence et j'en prends mon parti. Si j'ignore les choses de l'art, il faut quand même que j'ouvre la bouche pour dire tout et n'importe quoi. C'est là le problème.

Intransigeance a écrit:
Euterpe a écrit:
Dans ce cas, on n'est plus dans la mélancolie. Complaisance ou pas, on n'en sort pas.

Il s'agirait donc davantage d'une pathologie ? Je crains que non. A mes yeux (et aux miens seulement sans doute), la mélancolie est susceptible d'être soignée, si seulement le sujet le veut bien. Bien sûr, il sera éternellement et plus que les autres sujet au vague à l'âme et aux pensées douloureuses, mais je ne doute pas un seul instant qu'il ne puisse s'en extraire et en faire une arme pour son bonheur futur. C'est d'ailleurs une des idées véhiculées par Cyrulnik.
Le côté pathologique de la mélancolie est bien souvent secondaire. On ne peut pas exactement parler d'une pathologie, ce serait beaucoup trop réducteur et surtout trompeur. C'est de ce point de vue que je vous dis qu'on n'en sort pas. On peut sortir, même très mal, quitte à ce que ce ne soit que provisoire, de la maladie (sauf les maladies incurables). Mais, puisque la mélancolie n'est pas exactement une maladie, on n'en sort pas. Pour les idées véhiculées par Cyrulnik, attention toutefois à ne pas perdre de vue la résilience, centrale chez lui. Ce qu'il dit, c'est qu'on peut, avec beaucoup de chance, d'intelligence, etc., y trouver son compte, non sous la forme de la complaisance, mais vivre avec. Il prend bien soin de préciser que, si c'est possible, c'est et ça reste rarissime.

Intransigeance a écrit:
Euterpe a écrit:
La beauté est propre à chacun ? Mais alors il faudra m'expliquer pourquoi ceux-là mêmes qui bassinent les autres avec cet argument sont les premiers à revenir à la charge à la première occasion.

Je ne comprends pas de quels "autres" vous parlez. Et finalement, heureusement que tout le monde ne fonctionne pas de la même façon, et heureusement que certains pensent que le beau est universel, cela nourrit nos débats.
Si tout n'était que "propre à chacun", il n'y aurait pas même de discussion.

descriptionMélancolie intelligente - Page 6 EmptyRe: Mélancolie intelligente

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Euterpe a écrit:
Mais, puisque la mélancolie n'est pas exactement une maladie, on n'en sort pas.

Cela devient du fatalisme. Et c'est triste de penser de la sorte, je pense, au contraire, qu'il s'agit d'une réelle maladie, et par suite, qu'il est possible de la soigner.

Euterpe a écrit:
Si tout n'était que "propre à chacun", il n'y aurait pas même de discussion.

Je suis plus nuancée, chacun a une vision personnelle de la beauté mais, dieu merci, parfois ces visions se croisent et se recoupent pour former un "beau commun".

descriptionMélancolie intelligente - Page 6 EmptyRe: Mélancolie intelligente

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Intransigeance a écrit:
Euterpe a écrit:
Mais, puisque la mélancolie n'est pas exactement une maladie, on n'en sort pas.

Cela devient du fatalisme. Et c'est triste de penser de la sorte, je pense, au contraire, qu'il s'agit d'une réelle maladie, et par suite, qu'il est possible de la soigner.

La question n'est pas de savoir si c'est triste de penser de la sorte, encore moins si c'est fataliste ou pas. La seule question est de savoir ce qu'est la mélancolie, plus précisément ce que nous en savons ou pouvons en savoir. Êtes-vous à même de donner un cas, ne serait-ce qu'un seul, et dûment répertorié, de guérison de la mélancolie ? Vous disposez d'une documentation gigantesque en la matière, à commencer par les témoignages des mélancoliques eux-mêmes ou de leurs proches. Enfin, même les critères du DSM IV ne font pas l'unanimité et sont sujets à d'incessants débats entre spécialistes depuis des décennies. Le mot même de mélancolie est tellement embarrassant qu'on lui préfère l'expression faible et vague de dépression majeure, qui n'est pas un concept, mais la synthèse toujours plus volumineuse d'observations multiples additionnées les unes aux autres en attendant mieux. On attendra longtemps. A vrai dire, on attendra toujours.

Petite précision. Je ne sais pas dans quel contexte vous posez cette question, mais si c'est d'un ami à vous qu'il s'agit, ou d'un membre de votre famille, je vous déconseille de vous faire croire ou de lui faire croire qu'il ou elle pourrait s'en sortir comme on sort de chez soi. Vous auriez tôt fait de mettre en pratique des "recettes", même sans vous en rendre compte. C'est la dernière chose à faire. En la matière, la première des sagesses est de ne jamais se substituer au corps médical, et d'admettre que l'opinion des uns ou des autres n'y a aucune espèce de légitimité, même quand elle est bien renseignée.

Intransigeance a écrit:
Euterpe a écrit:
Si tout n'était que "propre à chacun", il n'y aurait pas même de discussion.

Je suis plus nuancée, chacun a une vision personnelle de la beauté mais, dieu merci, parfois ces visions se croisent et se recoupent pour former un "beau commun".

Ah bon ? Il faudrait déjà prouver que "chacun" a une vision personnelle de la beauté. Or il se trouve que beaucoup s'en contrefichent éperdument. Il faudrait également prouver que chacun en a une expérience et/ou une connaissance suffisamment consistante pour envisager la seule possibilité d'une "vision personnelle". Enfin, si "vision personnelle" il y a, son détenteur devrait être à même d'en faire l'objet d'un discours d'un peu plus de deux lignes, pour montrer qu'il a au moins une conscience claire de sa vision.

bauhaus a écrit:
Il est souhaitable, il me semble, que chacun soit la mesure du beau, et que la beauté demeure le beau de chacun.

Et en quoi cela serait-il souhaitable, cher Teutonicianus villosus, voulez-vous bien nous le dire ? Or, votre souhait est déjà plus qu'amplement réalisé, et satisfait, tant vous êtes nombreux à décréter, ni plus ni moins, que chacun est aujourd'hui la mesure du beau. Au lieu d'affirmer en pontifiant derrière le nom de Protagoras, ayez donc le courage d'un argumentaire en bonne et due forme.

bauhaus a écrit:
Qu'eût été Baudelaire s'il s'était soumis à la beauté bourgeoise du 19ème siècle au lieu de défendre sa "propre" vision de la beauté ?

Il y a quelque chose de divertissant, désopilant même, à lire quelqu'un affirmer à ses propres dépens qu'il n'a pas lu l'auteur qu'il prétend avoir lu en s'y référant. Surtout quand cet auteur est encore l'une des principales mesures du beau, à laquelle chacun ou presque, même sans le savoir, et même mal, souscrit. Lisez au moins Le peintre de la vie moderne. Je doute que ça vous réforme, mais si ça peut nous éviter une énième de vos énormités, ça nous fera des vacances.

Dernière édition par Euterpe le Dim 9 Fév 2014 - 18:06, édité 2 fois

descriptionMélancolie intelligente - Page 6 EmptyRe: Mélancolie intelligente

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Il y a quelque chose de monstrueux, me semble-t-il, à faire du mélancolique un cas clinique. Étant mélancolique, j'ai l'impression que l'on me refuse toute considération ou toute humanité, comme si la mélancolie était une maladie à éliminer et dangereuse, menaçante, au même titre que la folie ou le sida. Est-ce si grave d'être mélancolique ? J'ai l'impression que la pathologie a perdu son sens étymologique et sert à objectiver des individus jugés malsains que la biologie sert à éliminer ou brimer. Comme si la normalité, par l'intermédiaire d'une rationalisation, permettait froidement d'exclure ce qui ne correspond pas aux attentes communes de la masse. Je ne réfute pas pour autant l'aspect maladif du mélancolique, peut-être inadapté au monde, mais de là à en faire un état d'exception hautement condamnable il y a un pas que je ne franchirai pas. Et vous, gens normaux, quelle est votre névrose ? :|
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