Portail philosophiqueConnexion

Bibliothèque | Sitographie | Forum

Philpapers (comprehensive index and bibliography of philosophy)
Chercher un fichier : PDF Search Engine | Maxi PDF | FreeFullPDF
Offres d'emploi : PhilJobs (Jobs for Philosophers) | Jobs in Philosophy
Index des auteurs de la bibliothèque du Portail : A | B | C | D | E | F | G | H | I | J | K | L | M | N | O | P | Q | R | S | T | U | V | W | X | Y | Z

descriptionPar delà bien et mal comme commentaire du Zarathoustra ? EmptyPar delà bien et mal comme commentaire du Zarathoustra ?

more_horiz
Lisant il y a peu des lettres de Nietzsche, j'ai lu ceci :

t'es-tu débrouillé dans mon Par delà bien et mal ? C'est une sorte de commentaire de mon Zarathoustra. Mais qu'il faudrait bien me comprendre pour comprendre en quoi c'en est le commentaire !


Ceci m'a fortement intrigué ! En quoi PBM peut-il constituer un commentaire du Zarathoustra ?... Peut-être devrait-on d'abord se demander ce que Nietzsche entend par "un commentaire" ? Une explication ? Un approfondissement ?

On peut déjà noter une chose, c'est que les deux livres se suivent de très près dans leur publication (1884).
De plus, on retrouve dans les deux les mêmes thèses, bien qu'elles soit présentées de façon différente.

descriptionPar delà bien et mal comme commentaire du Zarathoustra ? EmptyRe: Par delà bien et mal comme commentaire du Zarathoustra ?

more_horiz
Nietzsche le dit de façon plus ambivalente, plus élaborée, dans un brouillon de 1886 (reproduit dans les notes et variantes, chez Folio) :
Ce livre est composé de textes écrits en même temps que Ainsi parlait Zarathoustra, plus exactement, pendant les entractes de ce travail : soit comme récréation, soit comme auto-interrogatoire ou autojustification, au beau milieu d'une entreprise extrêmement hardie et pleine de risques. — Qu'on se serve de ce livre dans un but semblable : ou encore comme d'un sentier labyrinthique qui attire obstinément le lecteur vers ce terrain dangereux et volcanique d'où ledit "Livre pour tous et pour personne" a justement surgi. Bien que ce "Prélude d'une philosophie de l'avenir" ne soit et ne veuille pas être un commentaire à l'enseignement de Zarathoustra, il faut peut-être y voir une sorte de glossaire où apparaissent toutes, ici ou là, et nommées par leur nom, les innovations conceptuelles les plus importantes de ce livre sans modèle, sans exemple et sans concessions.


De plus, on peut lire, toujours dans les notes et variantes, un extrait d'une lettre à Burckhardt, de 1886 également :
Je vous en prie, lisez ce livre (bien qu'il dise les mêmes choses que mon Zarathoustra, mais différemment, très différemment —)

En somme, si on tient compte de ce que dit Nietzsche, PBM est un livre dont la lecture doit tout à la fois précéder, coïncider avec et suivre la lecture de Zarathoustra. Comme une planète qui gravite autour de son soleil. PBM nous met en orbite. C'est un peu ce qui est censé nous déménager, nous extraire du masque millénaire de la philosophie dogmatique (cf. préface).

Pour ma part, je vois un prolongement à ce conseil de lecture dans cet autre conseil de lecture, le § 8 de l'Avant-propos de La généalogie de la morale :
Si l'on trouve cet écrit inintelligible et si l'on a du mal à l'assimiler, la faute me semble-t-il, ne m'en incombe pas nécessairement. Il est assez clair, pour peu qu'on ait lu auparavant mes écrits précédents, et qu'on n'y ait pas épargné sa peine : car ils ne sont pas d'un accès facile. Par exemple en ce qui concerne mon Zarathoustra, je n'admets pas qu'on prétende le connaître, si l'on n'a pas été, à un moment ou à un autre, tantôt profondément blessé, tantôt profondément ravi par chacun de ses mots : c'est seulement alors qu'on participera à l'élément alcyonien d'où cette œuvre est née, qu'on jouira du privilège de vénérer le rayonnement de sa clarté, de sa distance, de son ampleur et de sa certitude. Dans d'autres cas, la forme aphoristique de mes écrits présente une difficulté : de nos jours on n'accorde pas suffisamment de poids à cette forme. Un aphorisme, si bien frappé soit-il, n'est pas "déchiffré" du seul fait qu'on le lit ; c'est alors que doit commencer son interprétation, ce qui demande un art de l'interprétation. Dans la troisième dissertation de ce livre, je propose un modèle de ce que j'appelle, dans un tel cas, "interprétation". Cette dissertation est précédée d'un aphorisme dont elle est elle-même le commentaire. Évidemment, pour pouvoir pratiquer la lecture comme un art, une chose avant toute autre est nécessaire, que l'on a parfaitement oubliée de nos jours — il se passera encore du temps avant que mes écrits soient "lisibles" —, une chose qui nous demanderait presque d'être de la race bovine et certainement pas un "homme moderne", je veux dire : savoir ruminer...


Clairement, il y a une trilogie : Zarathoustra, Par delà bien et mal, et La généalogie de la morale.

Dernière édition par Euterpe le Ven 12 Aoû 2016 - 17:16, édité 1 fois

descriptionPar delà bien et mal comme commentaire du Zarathoustra ? EmptyRe: Par delà bien et mal comme commentaire du Zarathoustra ?

more_horiz
Je comprends...

Clairement, il y a une trilogie : Zarathoustra, Par delà bien et mal, et La généalogie de la morale.


Et quel rapport peut-on établir entre la Généalogie de la morale et ses deux prédécesseurs ?

Pensez-vous qu'il faille les lire dans l'ordre ?

descriptionPar delà bien et mal comme commentaire du Zarathoustra ? EmptyRe: Par delà bien et mal comme commentaire du Zarathoustra ?

more_horiz
Le titre même des œuvres nous donne déjà de bons indices. Nous avons le Zarathoustra, et nous avons le cortège de Zarathoustra. Par delà bien et mal, c'est une tête de pont sur un territoire où l'on vient à peine de pénétrer et qu'il s'agit de conquérir, un nouveau monde. La généalogie de la morale remonte jusqu'à sa source le fleuve que PBM emprunte en sens inverse, pour faire tomber les masques et les forêts de carton-pâte qui cachent la réalité du monde que l'on croyait connaître jusque là. Nietzsche combat sur deux fronts, devant et derrière lui, et même en tous sens, de façon concentrique. Où et d'où qu'il regarde, il emprunte de nouvelles voies et nous montre tout d'un œil neuf, l'ancien comme le nouveau. Ainsi, on peut lire La généalogie, puis le Zarathoustra, puis PBM ; ou bien lire le Zarathoustra d'abord, puisque tout ce qui suit en est tout à la fois le commentaire, l'interprétation, l'annonce, la déflagration. De toute façon, PBM est généalogique aussi, et La généalogie, notamment la 3e dissertation, c'est LE coup de marteau nietzschéen, dont rien ne peut arrêter l'onde qui avance, inexorablement, par delà bien et mal. Le cortège de Zarathoustra, c'est une armée qu'on ne voit pas mais qu'on entend, ce qui est d'autant plus effrayant. "La main sans scrupule" fait rouler le tambour de la terre...

descriptionPar delà bien et mal comme commentaire du Zarathoustra ? EmptyRe: Par delà bien et mal comme commentaire du Zarathoustra ?

more_horiz
aristippe de cyrène a écrit:
En quoi ce livre peut-il constituer un commentaire de cet autre livre ?... Peut-être devrait-on d'abord se demander ce que Nietzsche entend par "un commentaire" ? Une explication ? Un approfondissement ?

Devant l'incompréhension du public pour le poème de Zarathoustra et l'insuccès de cette parution, Nietzsche a dû changer de tactique. Il reprend donc un exposé plus systématique de sa philosophie, dont les grands axes se mettent progressivement en place à cette époque. La Généalogie accentuera encore cette volonté de clarification, dans sa forme même, trois dissertations rigoureusement enchaînées, et on peut même dire que ses derniers ouvrages (l'Antéchrist, Ecce Homo et le Crépuscule des Idoles) sont les plus limpides qu'il ait écrit, parce que sa pensée a atteint son point de maturation. On retrouve cette clarté dans les derniers fragments posthumes.
privacy_tip Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
power_settings_newSe connecter pour répondre