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descriptionLes valeurs de l'économie EmptyLes valeurs de l'économie

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Du plus rudimentaire des trocs jusqu'au plus élaboré des capitalismes, régi par des millions de lois et géré par des milliards d'ordinateurs, l'humanité a expérimenté une pléthore de systèmes économiques et pourtant semble ne pas avoir trouvé satisfaction. Avant de réfléchir sur ce que pourrait être le meilleur de tous les systèmes, il faut se doter des moyens de comparer ceux-ci entre eux. Quels doivent être les critères pour juger objectivement de la valeur d'un système économique ?


Commençons par discuter la nature de ces critères.
D'abord, il faut évidemment qu'ils soient applicables à tous les systèmes. Par exemple la richesse (au sens d'accumulation de devises) est absurde pour un système sans monnaie comme le troc.
Par ailleurs, puisque notre but est un jugement en toute objectivité, quelle utilité peut avoir un critère non quantifiable ? Admettons pour la suite de ce chapitre que l'un des critères retenus soit le bonheur individuel. Les distances ont leur mètre qui permet de comparer les sauts en hauteur ou les lancers de javelots ; les durées ont leur seconde qui permet de récompenser le plus rapide des coureurs ; le bonheur se voit bien dépourvu dans le domaine de la mesure. Faut-il renoncer à tout critère non quantifiable ? Si aucun des critères retenus n'est mesurable objectivement, faut-il abandonner l'espoir de comparer les systèmes économiques et considérer qu'ils sont tous à égalité ? Allons encore plus loin dans les hypothèses et admettons que le bonheur soit mesurable. Comment déterminer la part de bonheur reçue uniquement grâce au système économique pour la distinguer de la part obtenue d'autres sources, comme un sentiment d'amour par exemple ?


Abordons le choix de ces critères maintenant.
Il s'agit d'en sélectionner certains et d'en rejeter d'autres. Il faut donc les comparer entre eux. Autrement dit, il faut déterminer des critères pour juger les critères, ces premiers nécessitant d'être eux-mêmes sélectionnés selon des critères, et ainsi de suite... Faut-il déduire de cette plongée interminable dans l'abîme du jugement qu'il est impossible de déterminer des critères objectifs pour comparer les systèmes économiques ?


Terminons, malgré toutes ces difficultés peut-être insurmontables, par des tentatives de sélection de critères.
En considérant que l'économie se limite aux activités de production, distribution, échange, consommation de biens et services, nous pourrions être amenés à croire qu'il suffit d'observer les quantités produites ou la fluidité des échanges.
Ce n'est pas ma définition de l'économie, donc je ne peux me contenter de tels critères. Je suis convaincu qu'un système économique est avant tout un système de classement des êtres humains, jusqu'au point de déterminer qui a le droit de vivre et qui doit mourir. En effet, les ressources étant limitées, toutes sortes de pénuries sont possibles et dans de telles conditions, il n'y a pas de place pour l'égalité entre individus, seule une fraction de la population peut bénéficier de ces ressources. Nous le vérifions malheureusement chaque jour par le décès de ceux qui manquent de nourriture ou de soins médicaux, chaque hiver par la mort de ceux qui n'ont pas suffisamment de chauffage. Puisqu'il est question de vie ou de mort, faut-il retenir des critères de moralité pour juger un système économique ? De quel système moral les extraire ? Une moralité d'ordre religieux par exemple classerait sûrement les athées en dessous des agnostiques, eux-mêmes considérés comme inférieurs aux croyants, avec probablement une hiérarchie entre les croyants en fonction de leur niveau de dévotion.
Une moralité intrinsèque au système économique est-elle concevable ? Imaginons que les humains soient classés en fonction de la quantité et de la qualité de leur production individuelle, que la personne la plus morale est celle qui produit le plus et le mieux. Dans une telle société, quelle serait la place des enfants et des seniors, de tous ceux qui ne sont pas des actifs (au sens défini par Pôle emploi) ? Comment comparer la valeur de la production d'un plombier qui répare un évier à celle d'un artiste qui chante pour divertir ? Il faudrait juger la production des uns et des autres selon des critères, exactement comme nous voulions comparer les systèmes économiques entre eux... ce qui nous ramène au point de départ.

descriptionLes valeurs de l'économie EmptyRe: Les valeurs de l'économie

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EntaBliss a écrit:
[...] l'humanité a expérimenté une pléthore de systèmes économiques et pourtant semble ne pas avoir trouvé satisfaction.
Comment avez-vous pu interroger cette illustre entité répondant au nom d'humanité ?

Par ailleurs, puisque notre but est un jugement en toute objectivité, quelle utilité peut avoir un critère non quantifiable ? Admettons pour la suite de ce chapitre que l'un des critères retenus soit le bonheur individuel. Les distances ont leur mètre qui permet de comparer les sauts en hauteur ou les lancers de javelots ; les durées ont leur seconde qui permet de récompenser le plus rapide des coureurs ; le bonheur se voit bien dépourvu dans le domaine de la mesure. Faut-il renoncer à tout critère non quantifiable ? Si aucun des critères retenus n'est mesurable objectivement, faut-il abandonner l'espoir de comparer les systèmes économiques et considérer qu'ils sont tous à égalité ? Allons encore plus loin dans les hypothèses et admettons que le bonheur soit mesurable. Comment déterminer la part de bonheur reçue uniquement grâce au système économique pour la distinguer de la part obtenue d'autres sources, comme un sentiment d'amour par exemple ?
D'où la raison d'être de l'utilité ordinale.

Terminons, malgré toutes ces difficultés peut-être insurmontables, par des tentatives de sélection de critères.
En considérant que l'économie se limite aux activités de production, distribution, échange, consommation de biens et services, nous pourrions être amenés à croire qu'il suffit d'observer les quantités produites ou la fluidité des échanges.
Ce n'est pas ma définition de l'économie, donc je ne peux me contenter de tels critères. Je suis convaincu qu'un système économique est avant tout un système de classement des êtres humains, jusqu'au point de déterminer qui a le droit de vivre et qui doit mourir. En effet, les ressources étant limitées, toutes sortes de pénuries sont possibles et dans de telles conditions, il n'y a pas de place pour l'égalité entre individus, seule une fraction de la population peut bénéficier de ces ressources. Nous le vérifions malheureusement chaque jour par le décès de ceux qui manquent de nourriture ou de soins médicaux, chaque hiver par la mort de ceux qui n'ont pas suffisamment de chauffage. Puisqu'il est question de vie ou de mort, faut-il retenir des critères de moralité pour juger un système économique ? De quel système moral les extraire ? Une moralité d'ordre religieux par exemple classerait sûrement les athées en dessous des agnostiques, eux-mêmes considérés comme inférieurs aux croyants, avec probablement une hiérarchie entre les croyants en fonction de leur niveau de dévotion.
Une moralité intrinsèque au système économique est-elle concevable ? Imaginons que les humains soient classés en fonction de la quantité et de la qualité de leur production individuelle, que la personne la plus morale est celle qui produit le plus et le mieux. Dans une telle société, quelle serait la place des enfants et des seniors, de tous ceux qui ne sont pas des actifs (au sens défini par Pôle emploi) ? Comment comparer la valeur de la production d'un plombier qui répare un évier à celle d'un artiste qui chante pour divertir ? Il faudrait juger la production des uns et des autres selon des critères, exactement comme nous voulions comparer les systèmes économiques entre eux... ce qui nous ramène au point de départ.
Donc au final vous aboutissez à la conclusion que l'utilisation de la notion de "système économique" est stérile et que l'on en revient toujours à l'expression de préférences individuelles (cf. votre exemple du plombier et du chanteur) ? Cela est confirmé par le fait que vous affichez les vôtres en affirmant que "ce n'est pas ma définition de l'économie" ce qui implique nécessairement qu'il y ait un ou des individus à la tête du "système économique" qu'ils auraient façonné tels des démiurges.

descriptionLes valeurs de l'économie EmptyRe: Les valeurs de l'économie

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Bonjour ou bonsoir cher(ère) Kthun, je vous remercie sincèrement pour ne pas avoir envoyé mon sujet à la poubelle et, qui plus est, pour l'avoir trouvé digne d'intérêt au point d'y répondre vous-même.



Kthun a écrit:
l'expression de préférences individuelles [...] vous affichez les vôtres
C'est par humilité et par prudence que je m'exprime souvent à la première personne du singulier. Je ne suis un professionnel ni de la philosophie, ni de l'économie. Je ne suis pas même diplômé dans ces disciplines. Je vous livre donc mes doutes et mes interrogations sans les croire universels, mes hypothèses et mes conclusions en évitant de les présenter comme vérités absolues.


Kthun a écrit:
Comment avez-vous pu interroger cette illustre entité répondant au nom d'humanité ?
Certes, l'humanité ne m'a pas encore accordé d'entretien en privé. Je n'espérais pas cette affirmation purement exacte (d'où l'emploi du verbe 'sembler'), je la voulais accroche doucement provocatrice dans l'espoir d'éveiller l'attention du lecteur. Cependant, elle n'est pas totalement sans fondement. Je n'ai jamais lu ni entendu qui que ce soit se déclarer parfaitement satisfait du système économique dans lequel il baigne. Depuis les articles de journaux et ouvrages que j'ai eus sous les yeux, jusqu'aux émissions télé ou radio que j'ai écoutées, en passant par les discussions que j'ai eues avec autrui, tous et toutes, quand dédiés à l'économie, étaient noyés de plaintes et de suggestions d'amélioration. Je ne serais pas étonné qu'il en soit de même pour vous et pour bien d'autres.


Kthun a écrit:
D'où la raison d'être de l'utilité ordinale.
Ce qui me chagrine avec l'utilité ordinale, comme avec l'utilité cardinale, est la subjectivité sur laquelle elles reposent fortement, car elle les rend inefficaces et dangereuses.

Un exemple d'utilité ordinale inefficace :
Supposons que l'on demande à tous les humains de classer, selon leurs préférences, l'intégralité des systèmes économiques imaginables. S'il y a une infinité de systèmes économiques, cette tâche est interminable, personne ne pourra l'accomplir. Maintenant admettons qu'il y ait un nombre fini de tels systèmes. La subjectivité se base sur les ressentis, alors comment accorder la moindre fiabilité au jugement d'un individu qui n'a connu de toute sa vie qu'une forme de système capitaliste et n'a jamais expérimenté un système communiste ? Sur quelles impressions pourrait se focaliser une personne pour comparer deux systèmes inventés de toutes pièces par des chercheurs en économie et qui n'ont jamais été testés dans la réalité ?

Un exemple d'utilité cardinale dangereuse :
Pensez à un chef d'entreprise qui déciderait de sa propre rémunération et de celle de ses employés. Il lui est tout à fait possible de choisir de s'attribuer à lui-même une somme déraisonnable, jusqu'à devenir riche à n'en savoir que faire, et en parallèle de maintenir ses employés dans la pauvreté, au point que certains en arrivent au suicide, voyant leurs dettes s'accumuler, ne trouvant pas de meilleure offre et ne pouvant se résoudre à quitter leur emploi actuel car le chômage est une situation considérée comme encore plus épouvantable.
Vous croyez peut-être que l'État a mis en place des protections contre ce type d'abus, comme le minimum salarial, mais le SMIC ne permet pas une vie décente, surtout à Paris où les loyers ponctionnent une grande partie du pouvoir d'achat. De plus, certains contrats, comme celui d'apprentissage, autorisent un salaire inférieur à ce SMIC. Pire, certains contrats, comme ceux avec des stagiaires, permettent de les faire travailler sans les rémunérer.
L'État n'a pas non plus mis en place un système efficace de liaison entre utilité sociale et salaire, donc il est possible qu'un employeur se permette des dérives sexistes, racistes, communautaires, et par exemple sous-rémunère une femme noire musulmane tout en sur-rémunérant un homme blanc juif, alors qu'ils ont tous les deux sensiblement le même emploi.
J'aimerais un système qui ne permette pas de tels abus de pouvoir. Certes un système économique est nécessairement artificiel, mais je le voudrais aussi naturel que possible, au sens où il n'y aurait pas de décision humaine, pas de subjectivité. Puisque naturel ne peut être le terme approprié ici, je dirais plutôt mécanique.


Kthun a écrit:
Donc au final vous aboutissez à la conclusion que l'utilisation de la notion de "système économique" est stérile et que l'on en revient toujours à l'expression de préférences individuelles [...] ce qui implique nécessairement qu'il y ait un ou des individus à la tête du "système économique" qu'ils auraient façonné tels des démiurges.
Je vous félicite d'être parvenu(e) à voir une conclusion dans mon cafouillage aussi maladroit que désordonné, mêlant économie, moralité, religion. Vous alliez remarquablement persévérance et perspicacité !

Il est vrai que toutes les discussions sur les manières de réduire tel déficit ou d'améliorer telle balance commerciale me semblent vaines tant qu'il existe la possibilité pour une minorité de personnes de déséquilibrer le système en faveur de leurs préférences personnelles. Toutefois, le terme stérile me semble trop sévère. Je ne conteste pas que la notion de système économique soit tout à fait fructueuse quant aux inventions de méthodes de gestion des ressources, aux élaborations de théories de flux, etc. J'aimerais la remplacer par la notion de système de classement entre individus pour atteindre deux objectifs : d'une part en finir avec l'impression de fonctionnement purement mécanique de certains systèmes économiques et d'autre part marquer fortement l'importance de la moralité en la matière.

Concernant l'opposition fonctionnement mécanique et fonctionnement arbitraire de l'économie :
Je suppose que vous avez utilisé le terme démiurges en guise de point d'orgue d'une preuve par l'absurde pour démontrer combien mon point de vue est erroné. Peut-être avez-vous l'impression d'un fonctionnement de l'économie non maîtrisé humainement grâce à l'agrégation mondiale des offres et des demandes qui fixe les prix sur les marchés. Seriez-vous disposé(e) à changer d'avis si je vous montre qu'il est actuellement possible de créer et détruire des marchés, sans recours à une quelconque forme de magie, par la simple volonté d'une poignée d'individus ?
Pensez au marché de l'énergie photovoltaïque. Il a subitement vu le jour en France quand son gouvernement a imposé à EDF un prix de rachat de l'électricité produite qui rendait les installations rentables. Puis ce marché s'est effondré à peine quelques années plus tard, les entreprises du domaine faisant faillite les unes après les autres, en raison de la trop forte baisse de ce prix d'achat imposé, baisse décrétée aussi par le gouvernement français. Le marché est actuellement artificiellement maintenu en survie via les installations de son âge d'or et uniquement grâce à la durée imposée sur 10 ans de leur contrat, mais il n'y a plus guère de nouveaux souscripteurs.
Une autre création de marché à partir du néant ? Celui des droits aux émissions de dioxyde de carbone et autres gaz à effet de serre. Une autre destruction de marché ? L'amiante. Les exemples de décisions prisent par une minorité qui ont un impact économique majeur sur des millions, voire des milliards de personnes, sont légion. Est-il bien raisonnable d'accorder autant de pouvoir à un petit nombre ?

Au sujet de la moralité dans l'économie :
Idéalement, du moins selon mon idéal "mécaniste", nous disposerions d'un classement moral et complet de la population, ainsi que des moyens d'imposer ce classement à tous, y compris à ceux qui désireraient être mieux classés et à ceux qui aimeraient favoriser leurs proches. Il n'existe pas de dieu nous fournissant tout cela, en temps réel, de manière si indiscutable qu'il n'y aurait ni athées ni agnostiques. Donc l'humanité ne peut compter que sur elle-même pour élaborer ce classement en toute objectivité et pour le faire respecter. J'insiste toujours sur la notion d'objectivité car, dans ma quête du meilleur système économique possible, j'ai envie de justice. Il me semble que l'objectivité est l'unique guide efficace sur la voie de la justice parce qu'elle permet d'éviter les abus de pouvoir, les dérives des prises de décision individuelles telles que mentionnées précédemment avec l'exemple du chef d'entreprise. C'est pourquoi je m'interroge sur l'existence d'une moralité objective, dans l'espoir que les valeurs de l'économie globale ne soient pas celles prônées par une minorité qui la dirige.
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