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La démocratie est-elle propice au développement de la pensée philosophique ?

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5 participants

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JimmyB a écrit:
Mais c'est justement cela le problème, qu'il y ait un tel brassage de croyances et une telle uniformisation des valeurs, un renoncement à la hiérarchie des idées qui occasionne le fait que plus personne ne prenne la peine de dire ce qui est et surtout ce que ce n'est pas.
Je suis d'accord sur l'existence de ce problème, mais je ne vois pas tellement comment on pourrait faire autrement. Les philosophes, par exemple, et les intellectuels en général, sont là pour cela. Ils ont leurs lieux d'expression. Mais ils ne peuvent forcer quiconque à accepter leurs idées, du fait qu'eux-mêmes, de toute façon, s'opposent entre eux. Ils ne détiennent pas la vérité, au mieux ils formulent mieux que d'autres des problèmes, élucident des situations en les rendant cohérentes, proposent des thèses ou hypothèses à discuter et se basent le plus possible sur des faits objectifs. Ils sont comme les experts dont je parlais (ils en sont une autre sorte, puisque je pensais auparavant à des experts comme les économistes), et ont une fonction de conseiller. Il est vrai qu'auparavant, il y a même seulement quelques décennies, l'intellectuel avait une voix plus forte, son discours faisait autorité. En même temps, l'époque, comme maintenant, était très idéologisée, et je me demande si le philosophe a vraiment jamais eu une véritable influence, du moins directe, sur les individus. Le problème, dans un régime qui permet la liberté, qui passe nécessairement par la pluralité et son expression dans le conflit des idées, c'est qu'on ne s'écoute pas. On ne veut pas entendre l'autre dans sa différence, pour ce qu'il peut nous apporter. On refuse ce qui nous déplaît, comme si ce qui nous déplaisait était forcément faux. Et effectivement cela manifeste une forme de subjectivisme triomphant qui sape les fondements de l'autorité. Mais ce qu'on voit souvent c'est aussi, notamment dans le débat politique, que ces préférences que nous avons sont toujours justifiées par une théorie et qu'on s'accroche à elle. Si bien qu'il n'y a jamais de remise en cause de soi-même. Donc, d'une certaine manière, il me semble que le phénomène reste le même suivant les époques en tant que c'est l'opinion qui s'impose et que peu de personnes écoutent véritablement la voix discordante, notamment celle de l'intellectuel (sauf si cela va dans leur sens). Le seul apport du libéralisme c'est que ces autorités ne sont plus des maîtres, il n'y a donc pas de dogme explicite ni officiel à relayer, et qu'il est toujours possible d'exprimer une différence et de la prendre en compte pour se désentraver de notre propre ignorance ou du dogme que l'on soutient (souvent inconsciemment), ce qui aurait un effet critique. Mais peut-être pourrait-on dire qu'il y avait un prix à payer en sortant d'un état de minorité (le dogme religieux, monarchique) : le risque de retomber dans un autre état de minorité naissant de la prétention à se croire libre sans effort, parce que la loi le dit. On va croire que l'on peut tout dire et que l'on n'est pas responsable des propos tenus. Mais alors on est toujours dans la situation que décrivait Platon : il y a toujours de l'opinion, relayant des dogmes, et des hommes soi-disant libres qui prétendent détenir un savoir et qui en réalité ignorent leur propre ignorance. Je donne tout à fait raison à Platon sur ce point-là. Et je trouve cela déplorable, bien entendu, car il faut se battre contre l'opinion. Je rappelle juste que cette vérité est universelle, du moins valable dans toutes les sociétés occidentales depuis l'invention de la philosophie (qui est coextensive de la démocratie à l'origine). L'opinion et le dogme ne sont pas l'apanage de la démocratie libérale. Et c'est très bien que la philosophie soit en difficulté, c'est ce qui la fait vivre et la rend nécessaire. Elle n'a pas vocation à devenir une sorte de prêtrise. Et on publie tous les jours des textes qui nous mettent en garde contre les travers de notre époque, qui font des intellectuels la conscience de notre temps. Le seul problème, à mon avis, c'est plutôt que ces voix n'ont pas de force en tant qu'il y a une multiplication sans fin de médias, une trop importante production d'œuvres, etc. La parole est noyée dans un flux d'informations qui sont toutes mises sur le même plan. Si bien que ce sont toujours les mêmes milieux qui connaissent ou pratiquent la philosophie, milieux qui ne sont pas exempts de préjugés "de classe", et qu'on aura un public soumis à l'influence des médias, achetant ce qu'on lui dit d'acheter, avalant des opinions qui peuvent être les siennes mais décuplées.
JimmyB a écrit:
Eh bien justement, je pense, et l'histoire le montre d'une certaine façon, qu'une société liberticide ou inégalitaire quant à la liberté d'expression permet l'élaboration d'une pensée intellectuelle ayant pour but de résister au dogme.
Il y a autant de constructions intellectuelles que d'idoles aujourd'hui. En même temps je demande si elles ne sont pas un moindre mal quand on compare notre société à un régime totalitaire ou autoritaire ou encore théocratique.
JimmyB a écrit:
On évoquait la diffusion de la philosophie, vous étiez en train de nier qu'elle était davantage diffusée qu'auparavant, je prétendais le contraire.
Non, je ne nie pas que les ouvrages de philosophie se vendent plus, se diffusent, etc., je disais, et c'est une nuance importante, que la pensée philosophique ne se diffuse pas. Autrement dit : ce n'est pas parce que la philosophie se diffuse (comme objet de consommation) qu'il y a nécessairement plus de philosophes ou de penseurs, de gens éclairés. Il y en a sûrement un peu plus, puisque les études supérieures se sont elles aussi démocratisées, mais on observe que si la culture s'est démocratisée, si on est plus intelligent, il reste que cela ne rend pas plus philosophe. Tout simplement parce que l'éducation mise avant tout sur des compétences techniques. Il y a aussi que les gens n'ont pas tous le temps de lire, puisqu'ils travaillent, et s'ils lisent (ce qui chez les jeunes devient rare) ils le font avec des romans légers et courts. Donc, encore une fois, je dis que la situation est la même qu'avant : la philosophie est réservée à certains, toujours un petit nombre, et il y a toujours de l'opinion. Rêver d'une extension de la philosophie est bien joli, mais c'est peut-être un peu trop idéaliste. Et pour amener quelqu'un à la philosophie je crois qu'il faut, déjà comme le disait Platon, un naturel philosophe. Cela concerne donc peu de monde, un peu comme la sensibilité du poète. Pour autant, je ne voudrais pas par là justifier la situation de fait, au contraire les philosophes doivent se battre encore et toujours. Le problème, comme je l'ai dit plus haut, c'est qu'ils sont peut-être de moins en moins audibles, cantonnés à certains milieux, certains publics aussi, et que les seuls à apparaître dans les médias ne sont que des marchands de tapis qui sont où ils sont parce que cela profite économiquement à toute une industrie.
JimmyB a écrit:
Le souci est que celui dont le jugement est obscurci ira jusqu'à remettre en cause le professeur qui lui indiquera les erreurs d'interprétation.
Il faut bien oser commettre des erreurs pour progresser. Mais ce n'est pas la même chose que d'imposer son ignorance aux autres. Or, pour ma part, je n'ai jamais vu un étudiant vouloir faire la leçon à un professeur. Les seules fois où j'ai entendu des préjugés, des réticences infondées face au discours du professeur, c'est quand les étudiants réagissaient à chaud, sans chercher à comprendre ce qu'on leur disait et sans avoir idée, en réalité, de ce dont il était parlé. Ils n'avaient pas lu les auteurs et opposaient à des idées a priori déplaisantes, parce que remettant en question leurs habitudes, des discours préformatés (comme si ce qu'on leur disait pouvait tout et n'importe quoi). J'ai remarqué que ceux qui disent n'importe quoi n'ont aucune culture véritable, c'est-à-dire aucun savoir, ils ne lisent pas les auteurs qu'ils critiquent. Ou alors ils lisent des livres d'une facilité déconcertante (dans le procédé j'entends, pas dans la compréhension) qui leur permettent (sans qu'ils aient tout compris et cernent les enjeux - mais cela leur est égal) d'avoir un avis destructeur (qui a l'effet de les valoriser eux-mêmes et qui s'accompagne d'une soumission à leur gourou dont l'obscurité les ravit).
JimmyB a écrit:
Expérience personnelle et conséquence logique : l'opinion-reine uniformise les compétences.
 
Mais vous savez, pour en revenir aux experts, qu'avec la division des tâches et la spécialisation il apparaît de plus en plus que des gens très intelligents ont un savoir immense dans un seul domaine et ignorent tout du reste, ce qui ne les empêche pas de croire pouvoir donner leur avis sur tout.
JimmyB a écrit:
J'évoquais la société en général. Je prends un exemple sur une connaissance infondée, majoritaire aux États-Unis qui pourtant a été dénoncée par certains intellectuels comme Chomsky en vain. Pour 63% des Américains la France est un pays traditionnellement musulman (sondage de 2005). Chomsky a pu dire tout ce qu'il voulait, il a été ridiculisé notamment par des politiques républicains.
Autre exemple : le créationnisme qui, malgré les appels à la pédagogie des scientifiques, devient majoritairement l'idée établie pour expliquer l'origine de l'homme aux États-Unis toujours.

Croyance majoritaire contre argument minoritaire. Comme quoi il faut bien des experts, mais surtout une hiérarchie des compétences sur des domaines donnés.
C'est catastrophique d'en arriver là, c'est sûr. Mais je me répète : certes, les partisans de la démocratie s'illusionnent, par exemple en parlant de progrès (mais je crois qu'on partage tous plus ou moins une sorte d'idéologie bourgeoise, nous vivons dans une société bourgeoise, cf. Ellul), mais la situation, même si on peut justement vouloir qu'elle se soit améliorée, n'est pas si dissemblable que celle d'Ancien régime. Il y avait un dogme officiel cette fois, dont la critique était punie de mort. Et un Spinoza avait beau dire, même à ses pairs, qu'il ne s'agissait pas de la vérité, le philosophe en est resté impuissant. Aujourd'hui c'est la même chose, sauf qu'on ne risque plus grand chose. Cependant, il est vrai qu'on dit tout et son contraire, mais il y a aussi une judiciarisation de plus en plus importante et une réaction moralisatrice (qui peut dire aussi n'importe quoi et qui est souvent hypocrite et bête) aussi bien à gauche qu'à droite. J'ai surtout l'impression que c'est un problème d'éducation et pas tellement (ou pas directement) de démocratie ou de philosophie. A mon avis les médias sont fautifs, il faut d'ailleurs voir comment ils imprègnent de bêtise les jeunes dits de quartiers.
JimmyB a écrit:
C'est bien cela le souci, on est désormais dans une société où l'expérience fait nécessairement foi, et où le théoricien n'ayant pas connu ce dont il parle de plein fouet, devient dédaigné.
C'est vrai, ou alors c'est l'émotion qui règne. Mais est-ce qu'on refuse l'expert ? Je crois au contraire qu'on en demande, même si on se méfie des élites, des technocrates. On demande paradoxalement de la liberté et de la sécurité, on veut de la maîtrise, un savoir tout fait, un avenir déjà tracé, des remèdes à la crise et pas d'incertitude. Je pense aussi que des émissions comme celle d'Yves Calvi ont beaucoup de succès (et vous savez, de toute façon, que la France vieillit, donc en fait la grande majorité de la population a encore quelque savoir-vivre, ce qui ne l'empêche pas d'avoir son avis sur tout, souvent en tant que "contribuable" !).

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Kthun a écrit:
Le philosophe peut-il envisager, au moyen de l'ésotérisme, une éthique de la conviction lorsqu'il s'adresse au second public ?

Il semble que oui dans la mesure où, dans son cas, cela n'équivaut pas, dans le même temps, à renoncer à une éthique de la responsabilité.

Kthun a écrit:
le développement de la pensée philosophique est-il compromis ou bien, au contraire, favorisé ?

On pourrait considérer que la philosophie, ne vivant que d'être contrariée, dispose d'une occasion historique ; autrement dit certains individus qui pratiquent la philosophie dans une adversité qui ne se présente certes pas sous des dehors aussi dangereux qu'autrefois, mais qui est devenue d'autant plus omniprésente qu'elle ne s'incarne pas dans des institutions, des fonctions ou des rôles, ces individus ont l'occasion favorable de philosopher ; selon une éthique de la responsabilité, puisqu'on aurait du mal à concevoir une philosophie qui ne soit pas conséquentialiste ;  selon une éthique de la conviction également, parce qu'il importe d'être un résistant (je reprends ici le terme qu'Ortega applique aux libéraux), donc en partie "conservateur", or il est probable qu'à l'exception des VIe, VIIe et VIIIe siècles, il n'a jamais été aussi essentiel de conserver le travail de la civilisation occidentale, parce que la connaissance n'est pas loin de disparaître.

Silentio a écrit:
il faut se battre contre l'opinion.

Contre l'opinion qui se mêle de philosophie, pour ce qui nous concerne ici. Pour le reste, l'opinion est essentielle.

Dernière édition par Euterpe le Ven 29 Juil 2016 - 2:25, édité 1 fois

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Est-ce qu'il n'y a pas aussi une philosophie qui se mêle d'opinion ? Prenons Finkielkraut comme exemple (puisque vous en parliez plus haut). Son diagnostic est juste, ses critiques (du progressisme, du relativisme, de la modernité) aussi. Mais quand il essaie de l'expliquer, en général (car je n'ai pas lu son dernier livre et ne peux pas voir la vidéo que vous avez postée, j'utilise mon téléphone portable comme modem - je parlerai donc de ses idées d'après ses interventions publiques ou médiatiques), il me semble faire preuve d'un simplisme (par exemple critiquer le cosmopolitisme parce que voir des kebabs dans la rue ne nous fait plus nous sentir "chez nous" : sorte de subjectivisme romantique, mélancolique, qui ne peut accepter que le réel change et qui n'interroge pas ces sentiments premiers que ce discours sert plutôt à relayer, comme si les émotions du bon français avaient la force d'un argument) qui le mène de plus en plus à se radicaliser, à perdre en subtilité et malheureusement à faire le jeu du populisme d'extrême droite (et franchement on ne me fera pas croire que la droitisation de la vie politique est subversive, que le discours qui prétend combattre la "bonne conscience de gauche" n'est pas en réalité une bonne partie de ce qui flotte dans l'air du temps - au fond, c'est un discours très conventionnel et répandu, le politiquement correct du moment qui se cache lui-même en prétextant que le politiquement correct c'est l'autre, et qui a beaucoup de succès puisque la crise fait peur en nous plongeant dans une situation de précarité intenable, discours idéologique en plus qui prétend monopoliser le "réel" ; ajoutons à cela un gouvernement socialiste lamentable qui aide la réaction, si bien qu'on a pu faire passer une contre-révolution pour un Printemps français : on se raccroche alors à des chimères, à un passé idéalisé, à des mythes même si on ne sait pas définir ce qu'est l'identité, comme si notre histoire, la grande Histoire des grands hommes, n'était pas le fruit d'évolutions, de ruptures, de rencontres, d'anonymes, etc., comme si l'histoire de notre pays n'était pas aussi celle de l'universalisme né des Lumières et de la Révolution française ; or il semble que même Finkielkraut, de ce que j'en ai compris, en vienne à transformer sa critique en une arme politique pour un retour à un ordre qui ne peut plus exister et à employer des auteurs clairement contre-révolutionnaires ; or moi qui ait souvent défendu Finkielkraut j'ai l'impression que je ne peux plus le faire, qu'il n'est plus du tout ambigu, et je n'ai pourtant pas envie qu'il devienne, même malgré lui, l'idéologue du Front National et qu'il permette à ce parti de minables de monopoliser les questions cruciales qu'il pose, de la même manière que je crains de voir ce parti et la mentalité qui l'accompagne devenir la mentalité ambiante parce qu'il serait le seul à pouvoir capter les inquiétudes, alors qu'en fait c'est un parti d'habiles rhétoriciens qui, bien heureusement, ne pourront jamais réaliser leur programme). Comme si ce qui l'obsédait le menait à ne plus pouvoir être mesuré, comme s'il cédait au mal de l'époque qu'il dénonce pourtant. Ce qui le mène à laisser la philosophie servir une idéologie ou à devenir une idéologie, une théorie, une caution intellectuelle, une autorité faisant référence pour une ligne politique qui joue beaucoup sur l'affect, les croyances, la peur, le besoin de sécurité, etc. Mais, bien évidemment, c'est toujours le gauchiste qui a tort ! ;) Cela dit, il y a au moins deux limites à ce que je dénonce : on pourra toujours trouver un auteur de gauche qui fait subir le même travers à la philosophie (ce qui est normal, la droite n'a pas du tout le monopole de la bêtise) ; il est normal qu'un philosophe puisse aussi s'engager et prendre la parole comme citoyen, ce qui soulève néanmoins le problème wébérien de la distinction entre deux éthiques, deux registres de discours.

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Est-ce qu'on ne confond pas démocratie et ochlocratie (même si ce que nous critiquons ici se place plus au niveau social que politique) ? Et aussi : est-ce que ce sont vraiment les individus qu'il faut critiquer, comme s'ils étaient vraiment si libres que cela, comme ils croient l'être, ou leur conformisme n'est-il pas le résultat objectif de structures sociales ? Et est-ce que cela est vraiment imputable (exclusivement) à la démocratie (à supposer qu'on soit dans une démocratie) ?

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Silentio, vous parlez des différentes choses que recouvre le terme "démocratie". Or, vous ne mentionnez pas l'existence de la social-démocratie (correspondant à ce qui est visé par Schinz, à savoir la "démocratie sociale" pour reprendre sa propre terminologie).

Vous défendez la thèse que "X" (appelons-le ainsi pour éviter, dans la mesure du possible, l'influence que pourrait provoquer le nom de cet individu sur nos sentiments) qui, depuis plusieurs décennies, à l'aide des philosophes - qu'il vulgarise - du passé régale son auditoire et ses lecteurs (peut-être même qu'il se paie le luxe d'en "émanciper" quelques-uns au passage) en leur apprenant à mieux vivre voire à jouir de la vie (quand il ne flatte pas les passions anticléricales après avoir courageusement fustigé les riches et le monde de la finance) n'est pas un "philosophe" malgré le fait que la majorité lui prête ce titre. Au nom de quoi ne serait-il pas philosophe ? Il serait infidèle, dit-on, dans une certaine mesure, aux philosophes qu'il convoque. Les thuriféraires de X pourraient rétorquer que ce ne sont que des peccadilles, que ce sont des tourments de rats de bibliothèques ; mieux vaut préférer l'esprit à la lettre : "la vie" en premier, les philosophes en dernier. Au nom de quoi, en me faisant l'avocat du diable, ne pourrait-il pas être considéré sérieusement comme un philosophe ? Après tout, le philosophe (tributaire des structures sociales) varie en fonction du contexte politique, économique, social. D'aucuns prétendent que l'université donne le ton, en décrétant ce que doit être la philosophie à un instant t donné. Néanmoins vous dites qu'il n'existe pas nécessairement d'équivalence entre le "philosophe universitaire" et le philosophe digne de ce nom. Auquel cas, comment définir le philosophe (en partant du principe qu'il diffère et de l'expert et de l'intellectuel, que le philosophe ne soit pas absorbé par ces derniers) ?

Le philosophe (bien sous tous rapports, qui n'a pas le droit au qualificatif d'idéologue, par exemple Habermas) est-il celui qui défend de manière "critique" (pour reprendre votre expression) la démocratie ? De la même manière qu'il existait, fut une époque pas si éloignée, un marxisme sophistiqué (ésotérique) pour un public restreint et un marxisme vulgaire pour le grand public : pouvons-nous dire, actuellement, que la ligne de démarcation se situe entre le démocrate raffiné et le démocrate vulgaire ?

Euterpe a écrit:

Kthun a écrit:
le développement de la pensée philosophique est-il compromis ou bien, au contraire, favorisé ?

On pourrait considérer que la philosophie, ne vivant que d'être contrariée, dispose d'une occasion historique ; autrement dit certains individus qui pratiquent la philosophie dans une adversité qui ne se présente certes pas sous des dehors aussi dangereux qu'autrefois, mais qui est devenue d'autant plus omniprésente qu'elle ne s'incarne pas dans des institutions, des fonctions ou des rôles, ces individus ont l'occasion favorable de philosopher ; selon une éthique de la responsabilité, puisqu'on aurait du mal à concevoir une philosophie qui ne soit pas conséquentialiste ;  selon une éthique de la conviction également, parce qu'il importe d'être un résistant (je reprends ici le terme qu'Ortega applique aux libéraux), donc en partie "conservateur", or il est probable qu'à l'exception des VIe, VIIe et VIIIe siècles, il n'a jamais été aussi essentiel de conserver le travail de la civilisation occidentale, parce que la connaissance n'est pas loin de disparaître.

Pourquoi la connaissance n'est-elle pas loin de disparaître (nous pouvons en faire un autre fil, si vous le souhaitez, au cas où cela nous mènerait hors des sentiers battus du sujet) ?
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