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Le Nietzsche de Heidegger.

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JimmyB
Euterpe
Desassocega
7 participants

descriptionLe Nietzsche de Heidegger. - Page 3 EmptyRe: Le Nietzsche de Heidegger.

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Bien, précisément parce qu'il dit aussi, dans Le crépuscule des idoles, « La "raison" dans la philosophie », à la fin du 5e § :
Je crains bien que nous ne nous débarrassions jamais de Dieu, puisque nous croyons encore à la grammaire…

C'est ce qu'il explique dans les précédents paragraphes, comme je le disais. Quand il décortique "volonté" par exemple, ou le "je pense donc je suis". Il explique bien que la première chose qui fait qu'on croit à "l'âme", ou à d'autres "monismes", d'autres "atomes", et bien c'est tout simplement qu'il y a le mot "âme". Le "je" est ainsi pulvérisé par Nietzsche avec sa célèbre reformulation : "ça pense". Et le "ça", lui, n'est pas une unité monolithique, il décrit un processus. Il montre bien comment le langage est déjà en lui plein de préjugés, puis la façon d'arranger les mots, notamment les principes comme celui de causalité, qui sont trop grossiers pour recouvrir la réalité, ou encore l'usage de la copule, et là on peut se dire que c'est Heidegger qui est nietzschéen et qui a eu la révélation de l'oubli de l'être par la dénonciation de sa trop grande emprise par Nietzsche.

Quand je dis que parler de "la volonté de puissance", c'est déjà trahir Nietzsche, c'est parce qu'on voit bien que forcément l'article défini fait passer "volonté de puissance" pour un principe de "fond", comme vous dites. Comme une façon "vulgaire" et grossière d'interpréter le monde. On peut voir ce paragraphe comme une réponse à Schopenhauer : le monde comme volonté de puissance. En quelque sorte ça l'est. Mais pas seulement bien sûr.

Et ce que Nietzsche essaye de faire, c'est bien de détruire toute cette tradition philosophique du concept vulgaire "de fond". Nietzsche répond que votre histoire de "fond" n'a rien à voir avec de la "métaphysique". Car son "principe", son "socle", son "fond des choses", je ne vois pas comment le considérer comme quelque chose d'autre qu'instabilité et possibilité. D'ailleurs, "volonté de puissance" peut à mon sens se rapprocher, sans s'égarer, de l'intentionnalité husserlienne ou du Dasein. Il y a cette idée de la "direction", du "sens", de l'instabilité oui, de la possibilité oui. Il faut voir que quand Nietzsche parle de "volonté de puissance" il y a une idée unificatrice mais au sens propre.
En fait, si on fait dire à Nietzsche qu'il fait de la métaphysique, il faut alors dire que c'est celui qui dit : "ce que vous avez appelé métaphysique n'est même pas ce que vous auriez voulu au départ, vous n'avez pas été assez rigoureux, voici ce que serait la métaphysique. Schopenhauer a tort, mais s'il voulait vraiment interpréter le monde, alors il faudrait dire non pas qu'il est "comme volonté et représentation", mais "comme volonté de puissance"".

descriptionLe Nietzsche de Heidegger. - Page 3 EmptyRe: Le Nietzsche de Heidegger.

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Quand je dis que parler de "la volonté de puissance", c'est déjà trahir Nietzsche, c'est parce qu'on voit bien que forcément le "la" fait passer "volonté de puissance" pour un principe de "fond", comme vous dites.

Mais elle l'est... Ce n'est pas chaque individu qui a sa volonté de puissance et qui vit avec, mais c'est la volonté de puissance qui règne : elle n'est nulle part en particulier, elle est partout, sans compromis. C'est en ce sens qu'elle est une sorte de fond, car elle est comme à la source de tous nos actes. Et je ne pense pas que ce soit trahir Nietzsche de dire cela, car je pense qu'à son insu il y a encore chez lui quelque chose de tout à fait métaphysique et dont il n'a jamais pu débarrasser sa philosophie : le fondement. Bien sûr, il n'aurait pas du tout aimé qu'on dise qu'il y ait encore de grosses traces de métaphysique chez lui, mais c'est comme malgré lui. Et si Nietzsche est l'ouverture qui nous permet de penser au-dehors du cercle métaphysique, c'est précisément car il a encore un bon pied dedans.

Du reste, j'ai du mal à voir quels rapprochements vous pouvez faire entre l'homme comme volonté de puissance chez Nietzsche et le Dasein dont parle Heidegger.

descriptionLe Nietzsche de Heidegger. - Page 3 EmptyRe: Le Nietzsche de Heidegger.

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Ce que vous ne semblez pas vouloir comprendre, c'est qu'il s'agit bien sûr d'une "trahison", car vous n'arrivez pas à faire ce que Nietzsche demande et que je vous demande plus simplement : en finir avec cette idée du fondement, de l'essence, de la cause, de la source, etc. Vous voyez bien que vous êtes obligé de falsifier ce que je dis pour repartir sur votre histoire de fond. Vous admettez en effet : "elle n'est nulle part en particulier, elle est partout, sans compromis". Eh bien, alors, en quoi est-ce un fondement et une "source de tous nos actes" ? Puisque c'est également "tous nos actes". Vous voyez bien que ça ne tient pas.
Et donc, c'est bien le trahir, et sans en faire un gourou et moi un adorateur défenseur de la chapelle, je pense que c'est à la fois sous-estimer Nietzsche et ne pas l'avoir lu avec attention que de penser qu'il y a cette idée de la métaphysique vulgaire... J'ai bien précisé dans quelle unique vision on pouvait défendre que Nietzsche était plus métaphysicien que les métaphysiciens eux-mêmes, mais cela n'a aucun rapport avec cette idée de fond.
Encore une fois je ne fais pas le défenseur de la chapelle, mais je trouve que cette critique du pauvre Nietzsche qui n'a pas bien vu qu'il était "au fond" encore métaphysique me paraît dommage car c'est appauvrir sa pensée en plus de le réfuter de manière lapidaire sans trop avoir fait attention à ses propos.

Avez-vous essayé de relire Par Delà Bien et Mal, notamment les passages que je cite ? Votre réponse ne s’attelle qu'à un détail, la question du "fond". Ce bon vieux Nietzsche vous répondrait avec malice qu'il est significatif de la démarche d'un "métaphysicien" que vous vous soyez borné à un terme, de manière affective, plutôt que d'appréhender ma démonstration dans sa totalité. Comme quoi, c'est bien seulement ce vulgaire "fond" qui vous "titille" tant, et non cette "totalité" non métaphysique que Nietzsche propose.

Ce que j'essaye de dire en faisant attention à ne pas être dédaigneux ou condescendant, c'est que vous semblez parler de Nietzsche seulement à travers Heidegger, comme si lire Heidegger qui explique Nietzsche c'était lire Nietzsche, et que vous ne parlez que "grossièrement" de Nietzsche, sans parler de passages précis, lus, etc., mais en plus du problème inhérent à ce que je viens de dire, le problème c'est qu'il me semble que Heidegger a réussi à faire ce qui pour moi est le problème moral de sa "pensée" : c'est que c'est une "pensée" du jargon, et qu'elle empoisonne l'esprit par des concepts vulgaires et verbeux à tel point que toute personne qui le lit trop devient lui aussi esclave de son jargon.

descriptionLe Nietzsche de Heidegger. - Page 3 EmptyRe: Le Nietzsche de Heidegger.

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Oui c'est trahir ce que souhaite Nietzsche... mais ce qu'il faut essayer de voir, c'est si effectivement Nietzsche est parvenu à en finir avec le fondement, s'il n'a peut-être pas justement manqué (au sens de manquer une cible) cet objectif de sa philosophie. Ce ne serait pas la première fois que cela arrive en philosophie. Et en ces cas, la dernière personne à pouvoir voir ce manquement, c'est bien l'auteur lui-même. Je pense donc que vous êtes dans la mauvaise attitude si vous pensez que Nietzsche, parce qu'il affirme avec acharnement vouloir en finir avec la métaphysique, en finit bel et bien avec elle. Du reste, je ne fais pas de lui un métaphysicien, je dis simplement qu'il a peut-être encore un pied dans la métaphysique.

Quels paragraphes avez-vous cités ? Je les lirai volontiers et avec plaisir !
Puis, si dans votre développement je n'ai retenu que cette question du "fond", c'est tout simplement parce que c'est sur ce point que j'avais quelque chose à dire...
Déduction Transcendantale a écrit:
Ce bon vieux Nietzsche vous répondrait avec malice qu'il est significatif de la démarche d'un "métaphysicien" que vous vous soyez borné à un terme, de manière affective, plutôt que d'appréhender ma démonstration dans sa totalité. Comme quoi, c'est bien seulement ce vulgaire "fond" qui vous "titille" tant, et non cette "totalité" non métaphysique que Nietzsche propose.

Je ne comprends pas bien ce que vous voulez dire ici...

Déduction Transcendantale a écrit:
Ce que j'essaye de dire en faisant attention à ne pas être dédaigneux ou condescendant, c'est que vous semblez parler de Nietzsche seulement à travers Heidegger, comme si lire Heidegger qui explique Nietzsche c'était lire Nietzsche, et que vous ne parlez que "grossièrement" de Nietzsche, sans parler de passages précis, lus, etc.

Je vous crois quand vous dites ne pas vouloir être dédaigneux ou condescendant, et ne prends donc pas mal vos propos, mais vous comprenez bien qu'en sous-entendant que j'ai lu plus Heidegger que Nietzsche et que ce dernier influence mon jugement sur le second, vous m'accusez, condescendance ou pas, de manquer de probité intellectuelle... Or vous savez, cette histoire de "fond" chez Nietzsche, je ne l'ai pas déballée de mon chapeau en ayant simplement lu les cours que Heidegger a consacrés à Nietzsche. A la vérité, j'ai même plus lu Nietzsche que Heidegger, et je veille bien à lire les deux sans les yeux que porte l'un sur l'autre. Mais ce problème du fond chez Nietzsche, c'est en réalité mon professeur d'hypokhâgne qui me l'a pour la première fois mis sous les yeux. J'essaierai dans la semaine de retrouver les textes qui lui avaient permis de poser ce problème, et les posterai ici... Quant à la tentation de l'accuser à son tour de lire Nietzsche par les yeux de Heidegger, gardez-vous en : ses références à lui étaient plutôt Pascal, Kant et Nietzsche précisément.

Déduction Transcendantale a écrit:
mais en plus du problème inhérent à ce que je viens de dire, le problème c'est qu'il me semble que Heidegger a réussi à faire ce qui pour moi est le problème moral de sa "pensée" : c'est que c'est une "pensée" du jargon, et qu'elle empoisonne l'esprit par des concepts vulgaires et verbeux à tel point que toute personne qui le lit trop devient lui aussi esclave de son jargon.

C'est le sentiment que beaucoup de lecteurs ont. Mais ce qu'il faut comprendre, c'est que Heidegger n'use pas de ces termes un peu farfelus par plaisir de faire compliqué, mais il est comme forcé de parler comme il le fait, précisément car, ouvrant en quelque sorte un chemin hors de la tradition allant de Platon à Nietzsche inclus, il ne pouvait pas ne pas renouveler les termes. Pourquoi ne pas marquer homme plutôt que de s'embêter à traduire à chaque fois "être-le-là" pour Dasein ? Tout simplement car le mot homme est attaché à une tradition dont Heidegger sort, et en sortant, il ne peut pas en garder les termes qui feraient obstacle à ce qu'il cherche à nous montrer. Les termes farfelus qu'on trouve chez lui ne sont à la vérité là que pour y voir clair ; pour ne pas être pris soi-même par une tradition qui nous empêcherait de voir ce que Heidegger nous montre.

descriptionLe Nietzsche de Heidegger. - Page 3 EmptyArgumentation

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Je trouve très intéressante en tout cas l'argumentation systématique de Desassossego qui exige de lui-même et qui entraîne les autres du coup dans une réflexion.


J'ai lu l'article de Angèle Kremer-Marietti dont la démonstration m'a paru très faible. Heidegger pose un cadre assez systématique dans lequel il y a une réflexion importante sur les fondements, sur le questionnement lui-même. Cette approche peut échouer. En tout cas nous ne sommes pas dans le commentaire de texte généralisé mais dans une tentative de répondre à des questions authentiques (c'est ce qui caractérise à la fois la démarche de Nietzsche et celle de Heidegger). En ce qui concerne la volonté, Heidegger a été très influencé par la manière dont Saint Augustin pose la question. Il est important dans un domaine de recherche de bien comprendre quelle est la question et ce qu'on veut en faire.

Le débat de savoir si Heidegger a trahi ou pas la pensée de Nietzsche n'a aucun intérêt et il est évident que Heidegger développe sa propre pensée sur l'étant dans le Nietzsche. En disant que "Heidegger part d'un point de vue strictement heideggerien" Mme Angèle Kremer-Marietti a tout à fait raison, c'est exactement ce qui fait de Heidegger un philosophe avant d'être professeur de philosophie ou un commentateur. De ce côté Mme Angèle Kremer-Marietti est sans doute mieux placée.

Le problème qu'elle essaie de résoudre dans l'article cité n'est pas très explicite. Elle n'a pas une méthode qu'on pourrait critiquer, il s'agit d'une suite d'affirmations documentées, très bien d'ailleurs, évidemment. Cependant je préfère avoir une lecture de Nietzsche avec un éclairage cohérent et une question clairement posée qui me permettent de suivre un argumentaire.

Il faudrait un texte beaucoup plus explicite en ce qui concerne la question et la méthode pour évaluer les affirmations du texte. L'argument :
Il faut toujours se montrer prudent avec Heidegger, qui est, quoi qu'en disent de nombreux thuriféraires, un frelateur patenté. Notez bien que j'énonce un fait, pas un avis.

ne me semble pas renforcer l'argumentation de l'article même avec la note à la fin. Ce n'est pas à tout à fait ce que j'exige d'une preuve.
Pour le moment les approches de Heidegger me paraissent tout de même mieux argumentées.
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