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descriptionRecherche théorie selon laquelle l'Homme ne fait que "remplir" et "vider" EmptyRecherche théorie selon laquelle l'Homme ne fait que "remplir" et "vider"

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Bonsoir à tous, 

J'espère de tout cœur que ma requête ne sera pas totalement hors sujet et qu'elle sera reçue avec bienveillance si elle est complètement hors de propos... 

J'ai un jour, je ne sais plus du tout où ni comment, et c'est bien mon problème, entendu parler d'une théorie selon laquelle l'être humain passe sa vie à ne faire que "remplir" et "vider" ; son propre corps (boire, manger, enfanter...), ses armoires (nourriture, vêtements, biens divers), sa tête (connaissances, souvenirs...), et plus évidemment son frigo, son compte en banque, le réservoir de sa voiture, etc etc. 

Ce point de vue m'intéresse beaucoup et je cherche désespérément à en retrouver l'origine ! 

Je viens vers vous car Google ne m'est d'aucune aide ; Quiconque aurait un semblant de début de piste me rendrait un immense service en me la soufflant :) 

D'avance merci !

Victoire

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Dans Gorgias (Platon), Socrate voudrait convaincre Calliclès que ceux dont l’âme et la vie sont en ordre sont plus heureux que les déréglés. Le bonheur consiste à ne pas chercher à satisfaire les désirs et encore moins à les accroître. Calliclès n’est pas ébranlé. Socrate recourt à une image (parabole) : 
Platon a écrit:

Gorgias

SOCRATE
Eh bien, laisse-moi te proposer une autre image sortie de la même école que la précédente. Considère si tu ne pourrais pas assimiler chacune de ces deux vies, la tempérante et l’incontinente, au cas de deux hommes, dont chacun posséderait de nombreux tonneaux, l’un des tonneaux en bon état et remplis, celui-ci de vin, celui-là de miel, un troisième de lait et beaucoup d’autres remplis d’autres liqueurs, toutes rares et coûteuses et acquises au prix de mille peines et de difficultés ; mais une fois ses tonneaux remplis, notre homme n’y verserait plus rien, ne s’en inquiéterait plus et serait tranquille à cet égard. L’autre aurait, comme le premier, des liqueurs qu’il pourrait se procurer, quoique avec peine, mais n’ayant que des tonneaux percés et fêlés, il serait forcé de les remplir jour et nuit sans relâche, sous peine des plus grands ennuis. Si tu admets que les deux vies sont pareilles au cas de ces deux hommes, est-ce que tu soutiendras que la vie de l’homme déréglé est plus heureuse que celle de l’homme réglé ? Mon allégorie t’amène-t-elle à reconnaître que la vie réglée vaut mieux que la vie déréglée, ou n’es-tu pas convaincu ?
 
CALLICLÈS
Je ne le suis pas, Socrate. L’homme aux tonneaux pleins n’a plus aucun plaisir, et c’est cela que j’appelais tout à l’heure vivre à la façon d’une pierre, puisque, quand il les a remplis, il n’a plus ni plaisir ni peine ; mais ce qui fait l’agrément de la vie, c’est d’y verser le plus qu’on peut.
 
SOCRATE
Mais si l’on y verse beaucoup, n’est-il pas nécessaire qu’il s’en écoule beaucoup aussi et qu’il y ait de larges trous pour les écoulements ?
 
CALLICLÈS
Bien sûr.
 
SOCRATE
Alors, c’est la vie d’un pluvier que tu vantes, non celle d’un mort ni d’une pierre. Mais dis-moi : ce que tu veux dire, c’est qu’il faut avoir faim, et, quand on a faim, manger ?
 
CALLICLÈS
Oui.
 
SOCRATE
Et avoir soif, et, quand on a soif, se désaltérer ?
 
CALLICLÈS
Oui, et qu’il faut avoir tous les autres désirs, pouvoir les satisfaire, et y trouver du plaisir pour vivre heureux.

SOCRATE
Fort bien, excellent Calliclès. Continue comme tu as commencé, et garde toi de toute fausse honte. De mon côté, je ne dois pas non plus, ce me semble, en montrer. Et d’abord, dis-moi si c’est vivre heureux, quand on a la gale et envie de se gratter, de se gratter à son aise et de passer sa vie à se gratter.








Socrate ridiculise le motif de Calliclès criblé par des pulsions tyranniques. Les âmes désirantes sont condamnées à la vaine répétition dans un mauvais infini qui les prive à jamais de la bienheureuse contemplation satisfaisante. Le passage de l’analogie à l’eschatologie s’opère par l’évocation de l’Hadès, qui succède à la mort physique : hors du tombeau, cette âme mutilée continu son misérable et absurde drame répétitif qui consiste à se remplir pour se vider :

Platon a écrit:

Gorgias

SOCRATE
Euripide1 n’a pas dit la vérité dans le passage que voici :
« Qui sait si vivre n’est pas mourir,
Et si mourir n’est pas vivre ? »
Et il est possible que réellement nous soyons morts, comme je l’ai entendu dire à un savant homme, qui prétendait que notre vie actuelle est une mort, que notre corps est un tombeau et que cette partie de l’âme où résident les passions est de nature à changer de sentiment et à passer d’une extrémité à l’autre. Cette même partie de l’âme, un spirituel auteur de mythes, un Sicilien, je crois, ou un Italien, jouant sur les mots, l’a appelée tonneau, à cause de sa docilité et de sa crédulité ; il a appelé de même les insensés non-initiés et cette partie de leur âme où sont les passions, partie déréglée, incapable de rien garder, il l’a assimilée à un tonneau percé, à cause de sa nature insatiable. Au rebours de toi, Calliclès, cet homme nous montre que, parmi les habitants de l’Hadès – il désigne ainsi l’invisible – les plus malheureux sont ces non-initiés, et qu’ils portent de l’eau dans des tonneaux percés avec un crible troué de même. Par ce crible il entend l’âme, à ce que me disait celui qui me rapportait ces choses, et il assimilait à un crible l’âme des insensés, parce qu’elle est percée de trous, et parce qu’infidèle et oublieuse, elle laisse tout écouler.
Cette allégorie a quelque chose d’assez bizarre, mais elle illustre bien ce que je veux te faire comprendre pour te persuader, si j’en suis capable, de changer d’idée et de préférer à une existence inassouvie et sans frein une vie réglée, contente et satisfaite de ce que chaque jour lui apporte. 






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