Je serais plutôt d'accord avec vos deux premiers paragraphes, qu'on peut formuler plus simplement : le bonheur ne se vit qu'au passé (illusion d'un bonheur perdu, voire promesse à rebours, quand ça devient pathologique) et qu'au futur (illusion d'un bonheur à venir). Le bonheur serait toujours quelque chose de perdu ou de promis, jamais actuel ni jamais actualisable. C'est l'inactualité constitutive du bonheur qui permet de s'apercevoir qu'y penser manifeste son absence (bonheur au passé = nostalgie ; bonheur au futur = espérance).
Mais vous ne tirez pas correctement les conséquences de cela. Que l'on ne puisse penser au bonheur sans le perdre immédiatement pour cette raison même, cela signifie qu'il ne peut se vivre qu'au présent, jamais autrement. Ce qui signifie, ici, que le vivre au présent, actuellement (ici et maintenant), c'est le vivre sans y penser, dans son immédiateté même, dans une coïncidence à soi qu'il nous est rarement donné de vivre. On retrouve la classique séparation entre la pensée et le bonheur, qui a donné une iconographie admirable, et une immense littérature mélancolique.
Enfin, le bonheur semble l'apaisement ou le sommeil du désir plutôt que le contentement de tous les désirs, car le désir n'est plus alors prisonnier du cercle de la satisfaction et de l'insatisfaction, mais un désir plein de lui-même : l'accord, avec soi-même et avec le monde (cf. la parousie chez Rosset, ou ce qu'il dit du singulier, dans son œuvre, ou la présence chez Bonnefoy). C'est pourquoi le bonheur est et reste indéfinissable : qu'est-ce qui nous (r)accorde à nous-mêmes et au monde ? Tout et rien, on ne le sait pas à l'avance, ni quand, ni où.
En ce domaine, comme en tant d'autres, la preuve n'existe pas.
Mais vous ne tirez pas correctement les conséquences de cela. Que l'on ne puisse penser au bonheur sans le perdre immédiatement pour cette raison même, cela signifie qu'il ne peut se vivre qu'au présent, jamais autrement. Ce qui signifie, ici, que le vivre au présent, actuellement (ici et maintenant), c'est le vivre sans y penser, dans son immédiateté même, dans une coïncidence à soi qu'il nous est rarement donné de vivre. On retrouve la classique séparation entre la pensée et le bonheur, qui a donné une iconographie admirable, et une immense littérature mélancolique.
Enfin, le bonheur semble l'apaisement ou le sommeil du désir plutôt que le contentement de tous les désirs, car le désir n'est plus alors prisonnier du cercle de la satisfaction et de l'insatisfaction, mais un désir plein de lui-même : l'accord, avec soi-même et avec le monde (cf. la parousie chez Rosset, ou ce qu'il dit du singulier, dans son œuvre, ou la présence chez Bonnefoy). C'est pourquoi le bonheur est et reste indéfinissable : qu'est-ce qui nous (r)accorde à nous-mêmes et au monde ? Tout et rien, on ne le sait pas à l'avance, ni quand, ni où.
jeje62 a écrit:Autre preuve de l'absurdité de cette recherche
En ce domaine, comme en tant d'autres, la preuve n'existe pas.
Dernière édition par Euterpe le Ven 14 Mar 2014 - 0:14, édité 3 fois